Maurice

Le petit garçon qui voulait attraper le vent (5)

26 juillet 2016, par Jean-Baptiste Kiya

CHAPITRE II
Comment Firmin joue à l’ascenseur
Avec des cartes à jouer,
Se fait manger par grand diab,
Et ouït la prophetie du poisson réversible

Un petit point émeraude,
pas plus gros qu’un grain de letchi,…
avec bientôt des pains de sucre marron frangés d’écume qui montent,
- différentes teintes de vert qui s’élargissent, s’épanouissent, tels des pétales d’une fleur naissante,…
voilà ce que Firmin voyait se dessiner de là-haut.

Puis,
le jade d’une ceinture de corail,
bientôt l’ourlé d’ivoire d’une plage qui s’étire nonchalamment.
Des coupeurs de cannes semblables à des fourmis…
Tout cela dansait devant lui.

D’une pression de la main, le garçon appuya à l’avant de la flèche. Le cerf-volant se mit à basculer à peine. À l’approche des côtes, l’engin entraîné par des vents contraires se retrouva ballotté de tous côtés. Descendant trop vite et par à coups, le garçon ne pouvait davantage diriger son cerf-volant qui chancela, vira, et finit par s’accrocher par un retour de vent dans des basses branches d’un veloutier - avant de culbuter et d’interrompre sa course sur le dur des rochers. Le garçon avait tourneboulé sur le sol. Il n’avait rien. Quand il tourna les yeux, il vit le cerf-volant déchiqueté, lambeau de toile flottant au vent. Il se hâta de le ramasser. Cassé en deux, une partie pendait piteuse comme un vieux drapeau. En se brisant, le jouet l’avait protégé du choc. Une vague de tristesse mêlée de colère l’envahit, c’était comme si le monde entier avait soudain perdu de sa légèreté et qu’il s’était mis à peser de tout son poids sur ses épaules.

L’arc qui l’avait projeté si haut, pégase au dessin si fier, aux couleurs si légères, qui tutoyait les nuages, qui l’avait porté vibrant avec tant d’ardeur au plus haut du ciel, qu’était-il advenu, sinon ce morceau de tissu pendant, informe ? C’était comme si, avec son cerf-volant, son rêve s’était brisé, comme s’il venait de perdre une deuxième fois son père.

Le garçon leva les yeux au ciel, cherchant encore son jouet, façon de faire diversion à une amertume trop forte. Le vent l’avait porté, le vent l’avait jeté, c’était aussi bête que ça. Il l’avait abandonné dans un pays qu’il ne connaissait pas, dans lequel il n’avait pas d’amis. Qu’allait-il faire ? Des larmes brûlantes lui montaient aux yeux. Du revers de sa manche, il essuya ses paupières.

« Pourquoi pleures-tu ? », fit la petite voix de la taupe.

« Tu n’as pas vu mon cerf-volant !, repartit le garçon d’un ton de reproche.

- Ton père, il t’en fera d’autres, encore plus beaux… »

Le garçon haussa les épaules.

« Tu parles… Tout ça c’est ma faute !

- Détache-toi des choses qui font obstacles sur le chemin du cœur.

- Tu parles comme un livre. (Il lui montrait le jouet brisé) Est-ce qu’il m’en fera jamais d’autres ? Et puis, il était unique…

- Firmin, il faut être juste une taupe qui creuse son trou. Arrête de gémir sur ton sort, lève-toi, porte-le en terre, comme un trésor qu’on enfouit. Et ensuite, pars à la recherche de ton père. »

Firmin, immobile devant son cerf-volant démembré, répondit : « Je préfère l’abandonner aux courants marins ; de cette façon, il pourra rejoindre mon père là où il se trouve et lui apporter un peu de réconfort, qu’il sache que je pense à lui.

- … J’entends venir quelqu’un. Fais attention à toi » lança le petit animal en rentrant la tête dans le sol.

(Suite du chapitre II au numéro de vendredi).

Jean-Baptiste Kiya


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