La différence entre une pinte et une bassine d’eau, ou l’occasion donnée à Madame la Ministre Penchard pour se livrer à une fort utile méditation…

7 novembre 2011

Deux mots pour commencer sur le désastreux incendie que l’on sait.
Deux mots tout d’abord pour souligner que, de Madame Marie-Luce Penchard, le moins que l’on puisse dire après sa visite éclair de mercredi dernier à proximité des bois calcinés d’une partie de la forêt de notre île, c’est qu’elle aura laissé l’image d’une réelle et bien triste légèreté chez une ministre de l’État français. Laurent Bouvier, dans “Le Quotidien” de l’autre jeudi, résumait parfaitement le sentiment de tout un chacun en écrivant qu’en cas de telle crise, « la valise du ou de la ministre se doit de contenir des mesures concrètes. De ce point de vue, les annonces de Marie-Luce Penchard (…) font figure de mesurettes... Trois petites mesures d’urgence. Et encore aura-t-il fallu aux présentateurs (des journaux télévisés) les arracher à la ministre… ». Il est effectivement vrai qu’en écoutant Madame Penchard, on eût dit que, de notre “truc”, elle ressentait surtout le besoin de justifier les errements d’en haut, errements étonnants jusqu’à devenir révoltants. Errements qu’il fut demandé à Michel Lalande, parce qu’il ne devait pas oublier qu’il est Préfet et donc serviteur de l’État, d’en porter ici la responsabilité. Et maintenant que la ministre est partie retrouver son bureau de la rue Oudinot, et sans doute méditer sur la différence qu’Huguette Bello l’a invitée à faire entre « une pinte et une bassine d’eau », un seul Dash 8 donne raison à ceux et celles qui avaient, au tout début des feux, demandé à l’État que notre île française du bout du monde ait droit aux moyens dont n’importe quel coin de la France continentale ou de la Corse aurait bénéficié si d’aventure les forêts de là-bas avaient été menacées.

Deux mots donc pour appuyer l’opinion faite du bon sens paysan de ceux et de celles, de plus en plus nombreux, qui demandent que notre île, isolée à 8.000 kilomètres de la métropole, dispose désormais et en permanence de bons moyens — oui, de bons moyens — pour que nous n’ayons plus à attendre que d’autres milliers d’hectares soient détruits malgré l’immense et admirable engagement des hommes du feu d’ici qu’auraient rejoints ceux de la métropole. Sachons faire confiance aux experts en la chose pour une première approche de la question. Et un premier cahier de propositions qu’il conviendra sans doute d’amender.

Parallèlement, et nous en aurons terminé sur les conséquences de ce que notre île vient de subir de façon dramatique, nous faisons confiance à Elie Hoarau pour être à Paris et à Bruxelles l’avocat de toute notre région de l’océan Indien. Notre député européen vient, dans un courrier qui a été rendu public, de demander au Chef de l’État français qu’il active l’accès de La Réunion au Fonds de solidarité que l’Union européenne consent aux victimes de catastrophes naturelles. Il est évident que la démarche initiée par Elie vise à ce que le concept de « Région ultrapériphérique européenne » qui a été défini et arrêté par le Traité d’Amsterdam trouve aujourd’hui sa pleine dimension et, inévitablement, place la « RUP » que nous sommes devant une obligation de coopération, au cœur de son environnement géographique. Un dispositif européen de « solidarité aux victimes de catastrophes naturelles » n’a de grandeur humaniste que s’il n’ignore pas les pays de notre zone proche, pays qui connaissent d’énormes retards dans leurs développements et dont les populations vivent très pauvrement. Des moyens aériens de lutte contre les incendies en forêts basés dans notre île ne peuvent pas ne pas devoir automatiquement intervenir à Madagascar, à l’île Maurice, aux Comores, aux Seychelles et évidemment à Mayotte si, par malheur, des feux menaçaient le patrimoine forestier de ces pays voisins. Ce serait normal que l’Europe s’appuyât alors sur une de ses régions ultrapériphériques de l’océan Indien pour aider des pays pauvres de cette région du monde à faire face à une calamité dont ils ne sont nullement responsables et dont ils auraient assurément à souffrir lourdement. Une calamité qui affecterait aussi l’équilibre écologique de la planète…

Il est un autre sujet qui fait actuellement l’objet d’une intense réflexion et qui mériterait sans doute que la dimension que lui donneront ceux qui auront à signer son acte de naissance ne manque ni de discernement, ni d’ambition. Qu’elle ne manque pas non plus, dans sa définition du qualificatif « régional », d’un positionnement qui dépasse notre seul périmètre réunionnais. Nous voulons parler du projet de Centre Hospitalier Universitaire dont il est proposé qu’il passe par une fusion du « Centre hospitalier Félix Guyon » situé à Saint-Denis et du « Groupe hospitalier Sud Réunion » basé à Saint-Pierre.

Deux experts viennent d’être nommés par le gouvernement pour tenter de rapprocher des positions qui, dans le monde médical et politique réunionnais, sont loin de se rejoindre. La taille imposante de chacun des deux plus importants et plus anciens pôles de santé de notre île ne plaide pas forcément pour une seule entité. Par ailleurs, les gros besoins d’investissements dont a besoin l’établissement du Sud font que nombre de ses responsables ne souhaitent pas que les fonds que la gestion de celui-ci a pu préserver pour cela se retrouvent noyés dans une trésorerie commune au Sud et au Nord.

Et puis, si ce Centre hospitalier doit être « Régional » et « Universitaire », les temps ne sont-ils pas venus pour la France et l’Europe de favoriser la naissance d’un outil de coopération dans les domaines du médical et de la formation aux métiers de la médecine, d’un outil qui concernerait notre environnement géographique, nous qui sommes, répétons-le, une « Région ultrapériphérique européenne » ?

Nous ne pouvons qu’émettre le souhait que Messieurs Alain Hériaud et Alain Destée, qui sont, d’une part, Directeur du CHU de Bordeaux et Président de la conférence des DG de CHU et, d’autre part, Président de la Commission médicale d’établissement du CHU de Lille, se révèlent désireux, pendant le temps de leur mission, de rencontrer tous ceux que cette affaire inquiète et mobilise. Nous ne pouvons que souhaiter qu’ils sachent faire preuve de toute l’objectivité que demande l’examen d’un tel dossier. Si nous pouvions faire l’économie de recours en annulation et autres mouvements de protestation qui ne manqueraient pas si des personnes concernées se sentaient ignorées, si nous saisissions l’occasion pour penser coopération avec d’autres populations de la région, alors nous sortirions grandis d’une épreuve qui nous concerne tous.

Raymond Lauret

La Réunion Patrimoine mondial

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