“On a quelques comptes à régler entre politiques. Et là, elle sera chez nous…”

27 septembre 2010

Vendredi soir, en prenant connaissance de ce qui s’était passé lors de la réunion de la Sematra, comme certains d’entre vous, j’ai moi aussi pensé à ce que, dans “Témoignages” du lendemain samedi 25 septembre, Manuel Marchal écrivait : « L’acte de Didier Robert ramène La Réunion 50 ans en arrière… l’époque où sévissaient dans notre île les pires fraudes électorales ».

Et il est bien exact que, pour mener à bien son forfait, Monsieur le nouveau président de la Région Réunion a tout calculé. Minutieusement calculé.

Tout d’abord, ce Conseil d’Administration de la Sematra aurait tout à fait normalement pu se tenir au Conseil général, là où siège Nassimah Dindar. Personne n’y aurait trouvé à redire. Didier Robert a demandé à ce que la réunion ait lieu dans ses locaux du Moufia. Personne ne s’est alors posé de question. Un CA de la Sematra peut tout à fait se tenir à la Région. Et nul n’a osé imaginer que cette demande relevait d’un grossier calcul. Un calcul du genre : “Elle sera alors chez nous. Et chez nous, il nous sera aisé de lui imposer nos intentions”.

Il y eut ensuite, à l’heure et au lieu fixés pour le fameux Conseil, un constat totalement inhabituel : les seuls présents étaient les élus du Département et de la Région. Et là encore, pas un seul conseiller général n’a une seule seconde pensé que les autres membres du CA de la Sematra représentant les C.C.I. de La Réunion et de Mayotte ainsi que des actionnaires privés avaient pu être priés, par la puissance recevante, de s’abstenir pour une fois de venir. Motif assurément donné : « Le président souhaite évoquer sans témoin avec Madame la Présidente du Conseil général certains points d’ordre politique ». Ce qui, expliqué à d’autres administrateurs avec lesquels on entretient des relations plus “familières”, a pu donner : “On a quelques comptes à régler entre politiques. On sera dans les locaux de la Région. Et, croyez-nous, ça va saigner !”.

Et puis, en troisième lieu, il y eut, jetées sur la table à l’ouverture de l’examen des questions à l’ordre du jour, les deux résolutions pour que, d’une part, la présidente en titre (contre laquelle Didier Robert dira avec une rare hypocrisie à Idriss Issa, du “Quotidien”, qu’il n’est « pas dans une opposition frontale » et qu’elle « n’a commis aucune faute à la présidence de la Sematra » !) soit virée et que, d’autre part — désir d’humilier émanant de celui qui croit qu’il peut écraser parce qu’il est l’homme du pouvoir —, quelques actions soient prêtées à cette dernière pour que, si elle le souhaite, elle puisse rester au Conseil pour voir comment il va, lui, désormais mener les affaires ! Cela aussi, ni Alain Zaneguy, ni Thierry Robert, présents avec leur Présidente du Département, ne pouvaient imaginer qu’un élu du peuple pouvait le faire à d’autres élus du même peuple !

Nassimah Dindar ne pouvait que lever la séance. Et s’en aller. L’objectif était atteint. Alors, et enfin, Didier Robert et ses amis purent, comme ils l’avaient imaginé, poursuivre seuls la séance, et donc voter à l’unanimité leurs deux résolutions. Et plus particulièrement la première. Ne détiennent-ils pas à eux seuls 50% des parts de la SEM ? Et pourquoi donc qu’ils se gêneraient, les messieurs-dame ?

L’autre vendredi, nous avons vécu quelque chose qui, à s’y méprendre, ressemble à un coup de force. Tout avait été minutieusement calculé : du piège tendu avec le lieu proposé pour la rencontre… à la demande faite à certains actionnaires de ne point être là pour ne pas avoir à exprimer une position qui aurait pu être embarrassée ; de la préparation de deux résolutions scélérates… au désir de montrer qui détient désormais le pouvoir.

Et Manuel Marchal a bien raison d’évoquer la période des fraudes électorales couvertes, voire organisées, par le pouvoir avec la complaisante compréhension de certains médias il y a 50 ans. Une période qui nous revient subitement en mémoire, avec la tristement célèbre ordonnance d’octobre 1960 qui permettait au préfet de demander et d’obtenir l’expulsion de l’île de « tout fonctionnaire dont le comportement (était) de nature à troubler l’ordre public ». Sommes-nous dans l’exagération à trouver quelque similitude avec ce que, actuellement, il nous est donné de constater ? Quand, ici, on sort la menace de la révocation d’un maire (à quelques mois d’élections sur les deux cantons de la commune visée !) ! Quand, là-bas, on balance les Roms à la vindicte populaire jusqu’à ne pas entendre la réprobation générale !

J’ai pensé qu’il aurait été bon être un honnête personnage qui serait aujourd’hui foncièrement de droite. Cela aurait été l’occasion de se dresser contre les agissements de certains de son camp politique. L’occasion aussi de dire que nous avons tous mieux à faire que de vouloir monter certains Réunionnais contre d’autres et que l’idée du compromis qui permet d’avancer est sans doute l’avenir de notre société. Cela aurait été le moment de nous rappeler qu’il y a des gens bien et intéressants à droite autant qu’à gauche, et que si tous les préfets, fussent-ils dans le privé de bien sympathiques citoyens, ont une obligation d’exécution des ordres qui viennent de Paris, il pourrait et devrait en être tout autrement de nos élus d’ici-bas. Surtout quand, je pense ici à telle personne élue à la Région, on s’est bâti une image depuis les terrains de sport, là où nous avons tous appris à bannir les coups bas…

Raymond Lauret

Didier Robert

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