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18 juin 2011
« L’un des caractères marquants du discours colonial est sa dépendance au concept de “fixité” dans la construction idéologique de l’altérité » Homi Bhabha
Homi K. Bhabha est l’un des théoriciens les plus influents de ce courant intellectuel qu’on désigne par le terme de postcolonial studies (études postcoloniales). Il est né en 1949 à Bombay (Mumbai), en Inde. Après ses études primaires, secondaires et universitaires à Bombay, il part pour Londres où il obtient un diplôme de maîtrise en anglais et en philosophie à Oxford. Il enseigne ensuite l’anglais à l’Université de Sussex de 1978 à 1994 avant de rejoindre les États-Unis. Il est professeur de littérature anglaise et américaine à l’Université Harvard depuis 2001 après un passage à l’Université de Chicago.
Homi K. Bhabha est un auteur très lu et commenté de par le monde. Et ce, en dépit de la complexité de sa pensée. Plusieurs de ses ouvrages et articles sont traduits dans de nombreuses langues, notamment “The Location of Culture”, traduit rapidement en plus de 15 langues peu de temps après sa première parution en 1994, à Londres et à New York. Toutefois, le livre n’a été traduit en français aux éditions Payot, sous le titre “Les lieux de la culture. Une théorie postcoloniale”, que 13 ans après ! Figure phare des études postcoloniales, Homi K. Bhabha est surtout connu par sa conception de la notion d’hybridité.
Que sont les postcolonial studies ?
Il s’agit des recherches initiées sur les campus américains, dans les années 80, par des universitaires issus des pays anciennement colonisés, pour la plupart d’origine indienne. Ils viennent de divers champs disciplinaires, qui vont de la critique littéraire à la philosophie en passant par l’anthropologie, la sociologie et l’histoire. Ces recherches ne tombent pas du ciel. Elles se situent dans la continuité des Area studies (études des aires géoculturelles ouvertes à toutes les disciplines), des Africana studies, dans les années 60, en rapport avec les mouvements de décolonisation et d’émancipation, et des Women’s studies ou Gender studies, dans les années 70. Ces recherches, qui en ont généré bien d’autres (Asian-Américain studies, Latino ou Hispanis studies …), aspirent toutes à la pleine reconnaissance des « identités minoritaires », tout en leur donnant de nouveaux pouvoirs d’agir. La notion qui s’impose est celle d’identité, avec une tendance à la concevoir comme close, en l’essentialisant.
L’ambiance intellectuelle qui règne alors dans les départements de littérature et de sciences sociales américaines est au poststructuralisme et postmoderniste — courants critiques —, et l’heure est à la déconstruction. D’où l’influence de Michel Foucault (1926-1984) et Jacques Derrida (1930-2004). C’est là qu’entrent en scène Edward Saïd (1935-2003) et son livre sur “L’Orientalisme. L’Orient créé par l’Occident” (1994). Pour Saïd, le colonialisme n’est pas seulement la violence nue de la conquête, du pillage et l’exploitation de l’Homme par l’Homme. C’est une violence qui colonise, hiérarchise et ethnicise également les esprits en imposant une distinction radicale entre « colonisateurs »/« colonisés », « civilisés »/« primitifs », « centre »/« périphérie », distinction non seulement porteuse d’affrontements, mais qui assure l’hégémonie occidentale partout. Pour sortir de cette impasse, Saïd propose une nouvelle approche politique et éthique de la culture qui évite toute réduction de l’Autre à un sous-autre et toute opposition binaire (Voir notre article sur Edward Saïd dans “Témoignages”, 30/05/2011).
Les études postcoloniales se situent dans cette démarche, tout en allant beaucoup plus loin : sortir du modèle colonial de la représentation de l’Autre en déconstruisant les structures de pensée et les logiques héritées de la domination coloniale ; en finir avec cette domination sous toutes ses formes en donnant toute leur place à ceux et celles que le discours colonial a exclus. Le titre de l’ouvrage d’un des fondateurs des Subalterns Studies, Dipesh Chakrabarty, “Provincializing Europe”(2000) « est un bon résumé du programme postcolonial », écrit Beatrice Collignon, (2008). « Provincialiser l’Europe », disait-il, mais « dans un esprit de gratitude anticolonial ».
Sortir du paradigme colonial
« L’idée fondamentale des études postcoloniales est à mes yeux, écrit Homi K. Bhabha, la suivante. Au cours de XVIIIème et XIXème siècles, alors qu’une partie du monde créait des nations, des citoyens, des Droits de l’Homme, alors que l’Europe produisait ces idées extrêmement importantes et radicales, elle produisait simultanément des savoirs orientalistes, des stéréotypes, des “indigènes”, des individus qui se voyaient refuser la citoyenneté. En même temps qu’elle produisait de la civilité, elle produisait de la “colonialité”. Cette contradiction profonde est celle de la modernité elle-même. Et elle demeure manifeste aujourd’hui, dans les contradictions du processus de mondialisation » (Sciences Humaines, n°183, juin 2007).
Sortir de la « colonialité » pour ouvrir une nouvelle voie de la relation à l’Autre, à une nouvelle organisation du monde sans centre, ni périphéries, tel est le projet des postcolonial studies. Pour atteindre cet objectif, les théoriciens des études coloniales — notamment Gayatri Spivak, grande figure des études postcoloniales et Homi K. Bhabhan, son théoricien le plus achevé —, récusent les logiques et rhétoriques oppositionnelles en privilégiant le mouvement, le dépassement et la rupture. Contrairement à ce qu’induit le préfixe post, le postcolonial n’invite pas de se situer dans un après de la colonisation, mais à son dépassement, en inventant un autre rapport au passé, au présent et au futur. Pour ouvrir ce nouveau chemin, ils vont mettre en œuvre un certain nombre de concepts, tels que : ambivalence, mimétisme (mimicry), autreté (otherness), traduction culturelle, interstice, tiers-espace, hybridité…
Dans son livre majeur, “The Location of Culture” (LC), Homi K. Bhabha revient sur ces divers concepts, tout en nous invitant à repenser les questions d’identité, de diversité, d’appartenance nationale, ainsi que le rapport à l’autre en vue de les dépasser, grâce au concept d’hybridité culturelle. Bhabha est un penseur du mouvement et du “tiers-espace”. Il cherche à construire une pensée de l’espace tiers, comme pensée de l’émancipation, qui tourne le dos à l’analyse des situations coloniales en termes d’exploitation et de domination et aux oppositions réifiées et stériles entre centre et périphérie, identité et altérité. (Marie Cuillerai, 2007).
(A suivre)
Reynolds Michel
Sources :
BHABHA Homi K., “The Location of culture”, London-New York, Routledge, 1994
BHABHA Homi K., “Les lieux de la culture. Une théorie postcoloniale“, Paris, Payot, 2007
BHABHA Homi K., “Entretien avec Jonathan Rutherford, Multitudes” : http://www. Cairn ; info : revues-multitudes. Mise en ligne le jeudi 20 septembre 2007
GUILLERAI Marie, “Le Tiers-espace : une pensée de l’émancipation”, Acta Fabula, (2010). Dossier critique : “Autour de l’œuvre d’Homi K. Bhabha”, URL : http://www.fabula.org/revue/document 5451.php
COLLIGNON Béatrice, “Note sur les fondements des postcolonial studies”, EchoGéo (En ligne), Numéro 1/2007, mis en ligne le 06 mars 2008. URL : http://echogeo.revues.org/2009
DE LA VEGA Xavier, Entretien avec Homi K. BKABHA, Sciences humaines, n°183, juin 2007
BERGER Anne, “Traversées de frontières : postcolonialité et études de « genre » en Amérique”, “Entretien avec Anne Berger” par G. Leménager et L. Marie, in Labyrinthe (2), n0 24, 2006,
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