Après les déclarations de Sarkozy rapportées par Ramgoolam

L’insulte faite aux Réunionnais

18 avril 2011

« Nous n’accepterons jamais que des gens adoptent l’attitude d’un pays, d’une nation assistée (…). Sarkozy dit aux Réunionnais : pourquoi ne pouvez-vous pas faire comme les Mauriciens ? Pourquoi je dois vous donner autant de millions d’euros par mois ? Que s’est-il passé ? À La Réunion, ils ont de l’argent comme tombé du ciel, ils ne veulent faire aucun effort ».

Telles sont, rapportées par la presse, les déclarations de M. Navin Ramgoolam, Premier ministre de Maurice, en date du 6 avril dernier. Traitant les Réunionnais d’assistés, elles sont, pour le moins, inamicales. Elles ne devraient pourtant pas obérer la coopération entre nos îles. Par contre, elles mettent gravement en cause le président de la République française, en lui prêtant des propos non démentis. Ceux-ci sont scandaleux et révoltants car ils touchent à l’essentiel. Ils devraient ouvrir les yeux des Réunionnais.

Fiers de leur « modèle » économique, les Mauriciens jalousent parfois le développement de La Réunion lié à son appartenance à la France et à l’Europe. Ils se consolent en nous considérant comme des mineurs et des assistés. Ce n’est pas sympa. Mais nous devons continuer à œuvrer pour la coopération et l’intégration régionales, en dépit de ces péripéties. Les pays qui construisent l’Europe ont longtemps été en guerre les uns contre les autres. Et entre Anglais, ces « Rosbifs », et les Français, « ces mangeurs de grenouilles », ce n’est pas toujours le grand amour… Mais cela n’empêche pas la poursuite de l’intégration européenne.

Les déclarations prêtées à Nicolas Sarkosy seraient indignes d’un président de la République, garant de l’unité nationale. Elles nous pousseraient à « faire comme les Mauriciens » : cela veut dire mettre en oeuvre un modèle économique fondé sur l’exploitation d’une main-d’œuvre bon marché et des pratiques de paradis fiscaux, avec des atteintes graves à l’environnement insulaire. Ce serait tourner le dos à la politique suivie jusqu’ici. Cela veut dire aussi accéder à l’indépendance.

Ces déclarations présidentielles témoigneraient en outre d’un mépris pour les Réunionnais. Ils attendraient de la France « leur chèque de fin de mois » et seraient des assistés. Dire cela, c’est faire peu de cas de la communauté nationale. Les Réunionnais ne font que bénéficier des droits et que remplir les devoirs de notre République. La solidarité nationale à leur égard va aussi à l’immense majorité des départements français. En effet, du fait de la concentration spatiale de la production et des richesses, seule une quinzaine de départements apporte plus à la communauté nationale qu’elle n’en reçoit. Le « Président des riches » tiendrait-il les mêmes propos à l’égard des citoyens résidant sur plus des quatre cinquièmes du territoire français ?

Qu’on arrête avec le double jeu et le cynisme : on ne peut célébrer la mémoire de Césaire, chantre de la négritude et, dans le même temps, tenir des propos méprisants sur les Réunionnais.

Il faut rappeler que La Réunion a choisi librement de se décoloniser, par la départementalisation encensée par tous, en s’intégrant à la France, puis à l’Europe. Cela nous permet certes de bénéficier de la solidarité nationale et européenne, mais en contrepartie, avec le reste de l’outre-mer, nous apportons beaucoup à la communauté nationale. Que serait la France sans l’outre-mer qui lui permet d’être présente partout dans le monde, qui la dote dans le domaine maritime de la deuxième plus grande zone économique exclusive mondiale, qui lui fournit tant d’artistes, d’écrivains, de chercheurs, de sportifs de haut niveau pour ne prendre que quelques exemples ? Les mêmes observations valent pour l’Union européenne. Nous sommes français, nous appartenons à une communauté nationale solidaire et nous n’avons pas à rougir de la place que nous y tenons.

L’Élysée doit démentir les propos du président de la République rapportés par le Premier ministre mauricien. Les élus de La Réunion doivent interpeller les Mauriciens au sein des instances de la Commission de l’océan Indien, à laquelle la France a adhéré en 1986 « au titre de La Réunion ». De même, j’espère que les parlementaires vont interroger le Premier ministre français. La question est simple : le Gouvernement partage-t-il les propos prêtés au président de la République à l’égard des Réunionnais ?

Marine Le Pen a établi une carte d’adhésion au Front national pour Claude Guéant après ses déclarations sur l’immigration. Aniel Boyer devrait en faire une pour Nicolas Sarkozy, au Parti indépendantiste, si ses déclarations sont avérées.

Wilfrid Bertile


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