Acte 3 de la décentralisation – Évoluer en adaptant pour tenir compte du passé. Et pourquoi pas ? — 2 —

Le défi de la clarification des compétences entre les deux collectivités

15 mars 2013

Voici la suite et fin de la tribune libre de Pierre Vergès sur la réforme de la décentralisation.

J’ai parlé d’évoluer en adaptant pour tenir compte du passé.

Cela aurait l’avantage de ne pas bouleverser les équilibres qui ont été, dans les époques mouvementées de l’Histoire de La Réunion, les « marqueurs » de notre « vivre ensemble », malgré les crimes, les injustices, les inégalités qui ont ponctué le rythme soutenu des évolutions de notre société.

Entendons-nous bien : il s’agit d’une contribution au débat. Les situations évoluent, les personnes aussi, certaines étant pour une assemblée unique ont pu ensuite plaider pour une bi départementalisation avec une région aux pouvoirs renforcés.

Une phase « d’harmonisation » de la décentralisation

Pour ma part, ayant été aussi témoin, en tant que vice-président du Conseil régional de 2004 à 2010, d’une approche constructive des assemblées locales qui ont consacré en 2005 une nouvelle phase d’harmonisation des compétences entre la Région et le Département, je suis convaincu que les élus locaux pourraient

- s’accorder sur des mesures urgentes à consacrer par une loi d’orientation sur 15 ans,

- se retrouver sur une plateforme commune avec pour objectif un Acte 3 de la décentralisation adapté à La Réunion, avec deux collectivités qui ont fait leurs preuves depuis 30 ans, la région et le département.

Je ne vais pas entrer dans un débat d’experts sur les compétences précises dévolues à l’avenir à ces deux collectivités.

Pour 2 raisons : d’abord, je ne suis pas un « expert », et ensuite ce serait faire fi de ma volonté affichée que cela fasse l’objet d’un débat, puis d’un accord entre les élus concernés.

Asseoir la responsabilité réunionnaise dans le temps

Ces derniers pourraient se retrouver dans un hémicycle, associant les parlementaires et les représentants des communes, affichant ainsi leurs volontés de cheminer ensemble pour trouver une voie réunionnaise pour les générations futures.

L’aboutissement serait qu’une délégation composée des parlementaires, des représentants de la région, du département, et des communes réunionnaises, porte à l’Élysée et à Matignon la voie de La Réunion pour asseoir la responsabilité réunionnaise dans le temps, et l’espace india-océanique, sans tourner le dos à la France et l’Europe.

Un « bicamérisme » à la réunionnaise

Le problème majeur posé par une région à caractère mono-départemental est la confusion des rôles sur un même territoire.

Par extension, il arrive que cela se traduise par l’incohérence d’avoir deux assemblées sur un même territoire.

Si cela était vrai, il faudrait s’interroger sur cette « ambiguïté » qui prévaut depuis 1958 au plan national. À moins que la sagesse nous dicte de constater qu’il n’y a pas confusion des rôles entre l’Assemblée nationale et le Sénat.

Certes, ces deux assemblées votent des lois. Mais ce n’est pas la raison qui légitime leur coexistence sur un même territoire.

Un mandat, et un seul, et pour faire ce qui est raisonnablement possible

Ainsi, pour La Réunion, la question que l’on devrait se poser est celle de la disponibilité des élus pour accomplir des tâches résultant de compétences reconnues par la loi à la collectivité dont ils sont membres.

Je prends mon exemple : je suis vice-président délégué d’une part à l’Agriculture, et d’autre part aux Transports.

Je revendique aujourd’hui de maîtriser autant que possible les problématiques générées par ces deux domaines. Et cela prend du temps.

Je refuse de considérer que ce n’est pas la même chose pour les autres élus.

Autrement dit, si l’on ne veut pas que le travail soit « bâclé » demain, réduire le nombre d’élus est périlleux.

Préserver les équilibres en clarifiant les compétences

D’un autre côté, « regrouper » les élus du département et de la région dans une seule assemblée équivaudrait :

- d’une part à consacrer une assemblée de 94 élus (les 45 de la Région et les 49 du département) ;

- d’autre part à « écarter » tout équilibre entre deux assemblées sur un même territoire qui, par le passé, ont montré certes combien elles étaient capables de bloquer ou freiner une initiative, mais aussi combien elles pouvaient faire preuve de maturité dans la mutualisation des moyens ou l’harmonisation de leurs responsabilités.

C’est donc bien dans la clarification des compétences entre les deux collectivités, dans la dévolution de nouvelles compétences à l’aube d’une nouvelle ère de responsabilité locale, de la définition des rôles des communes et de leurs groupements, que réside le défi de l’Acte 3 de la décentralisation à La Réunion.

Le développement économique et le « marqueur » social

Sur ce plan, j’avancerais un principe directeur : la région serait chargée du développement économique pendant que le département assumerait la responsabilité de l’empreinte sociale, y compris dans les projets et initiatives relevant de la région.

Le département, outre les responsabilités dévolues à l’heure actuelle dans le domaine social, aurait à connaître des décisions relevant de la région, afin d’apprécier le « marqueur » social, et au besoin de suggérer de l’enrichir.

Il reviendrait en dernier ressort à l’assemblée régionale de décider d’intégrer ou non les propositions, faites par voie délibérative, des élus départementaux.

C’est sur la base de ces responsabilités respectives que, dans le respect de la parité, seraient élus de manière différente selon la collectivité les conseillers régionaux ou départementaux.

(Fin)

Pierre Vergès


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