Les esclavagistes ont été indemnisés, les victimes et leurs descendants maintenus majoritairement dans la pauvreté

20 ans après la « loi Taubira » : la question de la réparation du crime d’esclavage toujours posée

10 mai 2021, par Manuel Marchal

Cet après-midi, le chef de l’État présidera la commémoration de la Journée nationale de mémoire de la traite, de l’esclavage et de leurs abolitions. Ce 10 mai 2021 marque aussi le 20e anniversaire du vote de la loi reconnaissant l’esclavage et la traite en tant que crimes contre l’humanité. C’était la première fois qu’un Etat ayant fait fortune grâce à l’esclavage reconnaissait sa responsabilité dans ces crimes. Rappelons que si les esclavagistes ont eu une indemnité de l’État au moment de l’abolition de l’esclavage, les victimes et leurs descendants n’ont encore jamais bénéficié de la moindre réparation.

Au lendemain de la célébration du 150e anniversaire de l’abolition de l’esclavage à La Réunion en présence de Paul Vergès, les députés du PCR ont déposé une proposition de loi le 22 décembre 1998 « tendant à la reconnaissance de la traite et de l’esclavage en tant que crime contre l’humanité »

C’est aujourd’hui le 20e anniversaire de l’adoption par l’Assemblée nationale de la loi reconnaissant l’esclavage comme crime contre l’humanité. C’était une première dans un ancien Etat esclavagiste, qui doit une grande partie de sa prospérité actuelle à l’exploitation pendant des siècles d’êtres humains dans des camps de travail, où l’espérance de vie ne dépassait pas quelques années.
Cette reconnaissance vient d’un projet de loi présenté par les députés du Parti communiste réunionnais. Le 22 décembre 1998, les trois députés communistes réunionnais, Elie Hoarau, Huguette Bello et Claude Hoarau, ont déposé une proposition de loi « tendant à la reconnaissance de la traite et de l’esclavage en tant que crime contre l’humanité ». Quelques semaines plus tard, le groupe PS et apparenté, groupe majoritaire alors à l’Assemblée, a présenté un texte porté par Christiane Taubira qui limitait la portée de la reconnaissance à la traite transatlantique. Les députés du PCR ont alors fait prospérer l’idée de fusionner les deux propositions dans un seul texte. Cela déboucha sur la proposition de loi dont Christiane Taubira fut rapporteuse, et qui fut alors adopté à l’unanimité par l’Assemblée nationale. C’est le 10 mai 2001 que le Sénat a voté également à l’unanimité le même texte.

Indemnisation des esclavagistes

L’esclavage représente toujours plus de la moitié de l’histoire de La Réunion. A la différence des « engagés » qui subirent des conditions de vie aussi difficile, les esclaves n’étaient pas considérés par la loi comme des êtres humains, et ils perdaient donc automatiquement leur nom. C’est ainsi que la majorité des Réunionnais ont des noms de famille qui leut ont été attribués après l’abolition de l’esclavage en 1848. D’où la quasi-impossibilité pour les descendants d’esclaves de savoir vraiment qui ils sont.
L’exploitation pendant des siècles de cette main d’oeuvre gratuite est à l’origine de profits considérables. Très connue à La Réunion, Madame Desbassyns était une des plus grandes fortunes de France.
Pour que les esclavagistes acceptent plus facilement de ne plus être les seuls êtres humains reconnus par la loi, ils ont bénéficié d’une indemnité versée par le gouvernement français. Cet argent permit notamment la création de la Banque de La Réunion.

Toujours pas de réparation pour les victimes et leurs descendants

Pour les victimes, il n’était pas question d’indemnisation. La préoccupation du pouvoir était le maintien du système colonial organisé autour de l’exportation vers la France de produits peu ou pas transformés, et l’obligation d’acheter à la France des produits manufacturés à la valeur ajoutée plus grande. D’où l’importance de maintenir la structure de la plantation. Avec le développement de la canne à sucre, les anciens esclavagistes se tournèrent vers l’Inde pour faire venir des paysans connaissant cette culture. Cette arrivée massive de plusieurs dizaines de milliers de personnes a resrtucturé la société réunionnaise, diminuant le poids démographique des anciens esclaves.
A La Réunion, les conséquences de l’esclavage sont encore bien visibles. Les descendants d’esclaves composent en grande partie la classe de la population la moins favorisée. L’apport culturel des anciens esclaves a longtemps été méprisé. Il a fallu que le PCR lutte pour délencher un vaste mouvement pour que le maloya puisse être pleinement reconnu, au même titre que les apports venus d’Europe notamment.
Cela pose la question de la réparation d’un crime contre l’humanité.

M.M.

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  • Et pourquoi pas indemniser aussi tous les petits blancs qui ont été ruinés par l’abolition de l’esclavage lorsque leur esclaves devenus libres ont préféré les abandonner à la merci des banques à qui ils devaient un peu d’agent et qui les ont mis en faillite et les ont obligé à vivre dans des conditions pires que l’esclavage au point que beaucoup d’entre eux ont préféré se refugier dans les et hauts de l’île aux endroits occupés par les esclaves qui s’étaient révoltés avant la proclamation de l’abolition de l’esclavage par Sarda Gariga .

    Aujourd’hui la plaine des cafres s’appelle toujours la plaine des cafres mais elle est devenue plutôt la plaine des petits blancs des hauts , et beaucoup des descendants des petits blancs qui se sont réfugiés à Cilaos n’ont pas d’autres choix que de rester là où ils sont ,non pas parce que Cilaos est un endroit d’où l’on ne peut pas ressortir selon la traduction de son nom d’origine malgache, mais parce que leur situation sociale les oblige à y rester et à vivre dans l’indignité des minima sociaux plutôt que dans la dignité du fruit de leur travail . Après le peuplement des hauts de l’île par des esclaves marrons ou plutôt par des esclaves qui se sont libérés eux mêmes , sans attendre Sara Gariga ; il faut bien le reconnaître , les hauts de l’ile de la Réunion ont accueilli d’autres esclaves , des esclaves blancs réduits en esclavage par l’application sans pitié des règles de la société capitalistes de l’époque pour qui ,ceux qui ne réussissaient pas à gagner suffisamment d’argent pour vivre dignement étaient condamnés à vivre dans des conditions sociales pires que celles des esclaves d’antan.

    Tous ceux qui ont connu l’esclavage devraient donc être indemnisés , y compris les petits blancs des hauts , mais aujourd’hui leur indemnité , à défaut d’être des espèces sonnantes et trébuchantes qu’ils pourraient mettre dans leur poche ou investir dans des projets qui pourraient améliorer leur situation , pourrait consister dans un effort plus important des pouvoir publics pour améliorer leurs conditions de vie et notamment leur donner des routes de désenclavement plus sûres , des écoles primaires et secondaires de qualité et des moyens pour exploiter et mettre en valeur pour tout me monde l’immense potentiel touristique créé par le classement des haut de l’ile de la Réunion comme patrimoine mondial de l’humanité , à commencer par les réunionnais eux mêmes qui devaient avoir la possibilité de profiter des hauts de leur île , non pas pour se refugier , mais pour admirer les paysages , respirer le bon air et profiter de la qualités de ses produits agricoles et artisanaux et de la gentillesse légendaire des gens des haut de l’ile de la Réunion .


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