Du 27 avril 1848 à aujourd’hui

De la République coloniale à la lutte pour le développement

28 avril 2008, par Manuel Marchal

Appliquée le 20 décembre 1848 dans notre île, l’abolition de l’esclavage signifie que tous les Réunionnais sont des êtres humains.

Comme le précise Aimé Césaire, les pères du décret du 27 avril 1848 devaient apporter une réponse urgente à une exigence morale : reconnaître le statut d’être humain à tous les habitants des colonies de la République.
Si le décret prévoyait une abolition le 27 juin, les Réunionnais durent attendre jusqu’au 20 décembre, c’est-à-dire la fin de la campagne sucrière.

Si du jour au lendemain, la majorité des Réunionnais accédaient au statut d’être humain, ils n’avaient pas droit à l’égalité. Les séquelles de l’esclavagisme ont persisté avec le maintien du statut colonial. Les terres n’ont pas été cédées gratuitement à ceux qui les ont mis gratuitement en valeur par exemple. Au contraire, les anciens propriétaires d’esclaves ont eu droit à un dédommagement, et ont sans doute été rassurés par la déclaration aux relents paternalistes de Sarda Garriga prononcée le 20 décembre 1848 au Barachois. La Réunion entrait dans l’ère de la République coloniale.

Ce n’est que près d’un siècle plus tard que s’est ouverte enfin la porte de l’égalité. Les luttes sociales des années 30 avaient débouché sur des conquêtes pour les travailleurs, et sur un mot d’ordre : "La Réunion département français". L’abolition du statut colonial apparaissait comme la solution portée par les masses pour en finir avec la misère caractérisée par les bas-salaires, la mortalité infantile, les ravages du paludisme, l’habitat insalubre et l’illettrisme. Ce combat obtenait une victoire décisive avec le vote à l’unanimité de la loi du 19 mars 1946 : un siècle après l’abolition de l’esclavage, c’est celle du statut colonial. Cela signifie qu’en droit, les Réunionnais ont les mêmes droits que tout citoyen de la République.

Mais l’application de cette loi s’est heurtée à la réaction des milieux conservateurs, appuyés par les gouvernements qui se sont succédé à Paris. Les opposants à la loi du 19 mars 1946 ne reculèrent devant rien pour donner à la départementalisation un contenu réactionnaire : fraudes massives pour bâillonner l’expression populaire, refus d’étendre à l’Outre-mer les lois sociales, maintien des structures coloniales... Face à cette impasse, dans tout l’Outre-mer se sont créé des mouvements autonomistes prônant l’application de la loi du 19 mars 1946 par les peuples concernés.

Peu à peu, l’égalité sociale inscrite dans le droit est devenue une réalité, mais à La Réunion, le sous-développement persiste. Il est caractérisé par une crise structurelle marquée notamment par un chômage massif, une pénurie de logements, et l’illettrisme. C’est un nouveau cycle qui commence, celui de la lutte pour le développement et la responsabilité. C’est d’ailleurs ce que soulignait Aimé Césaire en 2006, lors d’un dialogue avec Paul Vergès à l’occasion du soixantième anniversaire de la loi du 19 mars : « nous savons ce dont nous avons hérité, (...) un cycle est terminé, mais un autre cycle commence. Il faut tenir compte de tout cela et faire un monde nouveau, sans nier le passé ».

Manuel Marchal

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