Culture et identité

Nous sautons dans l’année de la chèvre

Nouvel an lunaire

1er février 2003

Les Réunionnais dont les ancêtres sont d’origine asiatique (chinoise, vietnamienne, thaïlandaise...) célèbrent aujourd’hui avec leur famille et tous leurs amis le nouvel an lunaire. Ils célèbrent plus particulièrement l’entrée dans l’année de la chèvre. Ce nouvel an coïncide avec le premier jour du calendrier lunaire. La célébration du passage à la nouvelle année concerne environ 25.000 personnes dans notre île, soit près de 4% de la population réunionnaise.

L’immigration chinoise a comporté plusieurs phases distinctes, avec des fluctuations importantes selon les périodes. Elle a commencé au milieu du 19ème siècle avec l’engagement d’ouvriers agricoles. Mais les arrivées les plus massives datent du début du siècle dernier et de l’immédiat après-guerre. Pour vivre, les Chinois se sont rapidement orientés vers le commerce alimentaire, pas le même faste. La danse du lion ou du dragon est moins présente lors des manifestations publiques.
Dans le même temps, certains rites persistent dans les familles. Le balai est ainsi proscrit de la maison l’électroménager, la petite quincaillerie et les petites industries, réussissant leur reconversion par le biais de la diversification. Les dialectes d’origine ont bien souvent été abandonnés au profit du créole.

Les Réunionnais d’origine chinoise ont majoritairement adopté la religion dominante de l’île, le catholicisme, mais ils continuent de perpétuer un certain nombre de cultes traditionnels, comme le nouvel an chinois, la fête du "Double Dix", la cérémonie aux ancêtres....

Des rites à respecter

Mais à La Réunion, la fête de la nouvelle année ne se déroule pas de la même manière qu’en Chine ou dans les autres pays où la diaspora chinoise s’est installée. Les festivités durent moins longtemps et ne présentent premier jour de l’an nouveau, sous peine de faire fuir toutes la chance tout au long de l’année. La veille du nouvel an chacun, même l’enfant le plus réticent a le devoir de prendre un bain. Le cas échéant, il pourrait bien naître bœuf dans une vie ultérieure.
Durant la semaine qui précède l’événement, un grand nettoyage du logis permet de se préparer à accueillir les ancêtres dignement. L’orientation de la table destinée à recueillir les victuailles du réveillon est capitale. La table est ensuite recouverte d’une nappe bien souvent rouge, couleur de la renaissance, où sont placées des baguettes de santal. Du papier d’or et d’argent se consume en signe de remerciement aux divinités.
La nourriture n’est pas absente de la célébration. Des mets, autrefois dégustés par les ancêtres, sont déposés dans cinq plats. Des plats qui seront travaillés de différentes manières et que les vivants dégusteront plus tard.
Bonne année de la chèvre à tous nos compatriotes qui vont célébrer cette fête.
À La Réunion, la danse du lion ou du dragon est moins présente lors des manifestations publiques mais les réjouissances et les retrouvailles sont chaleureuses.

À chaque animal, son année
Le calendrier lunaire chinois est bien différent du calendrier grégorien. (voir encadré) Les années forment deux cycles confondus : le premier dure soixante ans, comprenant cinq cycles de douze ans. Chacune de ces douze années est symbolisée par un animal.
La légende veut que ce soit Bouddha, dans un souci de réorganisation de la Chine, qui ait convoqué il y a plusieurs milliers d’années tous les animaux de l’empire. Douze ont répondu à son invitation, arrivant dans l’ordre suivant : le rat, le bœuf, le tigre, le lapin, le dragon, le serpent, le cheval, la chèvre, le singe, le coq, le chien, et enfin le cochon. Bouddha les récompensa en attribuant à chacun d’eux une année qui porte son nom et possède ses caractères (selon les critères chinois, bien souvent différents de ceux de l’Occident). Les prédispositions de l’animal sont vouées à marquer à vie l’enfant né au cours de son année.
La journée des "trois débuts"
Conformément au calendrier qui prévaut encore dans la plupart des sociétés de tradition asiatique, l’année de la chèvre commence le 1er février 2003, pour se terminer le 21 janvier 2004.
Le premier jour de l’année est appelé "yuan dan". "Yuan" signifie "le début", et "dan", "le lever du jour". Ainsi le "yuan dan" indique non seulement le premier jour de l’année, le premier jour du premier mois mais aussi le début de toute une année ; c’est pourquoi ce premier jour est aussi appelé les "trois débuts".
Dès le matin, on procède au culte des ancêtres, auxquels l’on exprime sa reconnaissance. On offre devant les tablettes des ancêtres (planchettes en bois placées sur l’autel des ancêtres et sur lesquelles sont gravés les noms des défunts) des gâteaux de nouvel an, des fruits, des aliments sucrés et salés, du vin. On allume de l’encens et des bougies rouges puis on s’incline devant les tablettes en signe de reconnaissance de leur bonté, mais aussi, de celle des dieux, des parents et des aînés.
À la fin de la cérémonie, toute la famille se félicite mutuellement. Les enfants défilent devant les parents et présentent leurs vœux, de l’aîné au plus jeune, et du fils à la fille. Ils peuvent aussi recevoir une enveloppe rouge à ce moment-là, avec un peu de monnaie.
Le calendrier lunaire
Le calendrier chinois comme celui de nombreuses autres civilisations est à l’origine un calendrier lunaire. C’est-à-dire qu’il tient compte de la marche des deux grands régulateurs de la nature, le soleil et la lune, et se base sur des règles essentiellement astronomiques : les lunaisons.
Chaque mois d’une année lunaire, longue de douze mois, débute par une nouvelle lune et dure vingt-neuf à trente jours. Les mois n’ont pas d’appellation particulière, ils sont désignés numériquement, en fonction de leur ordre d’apparition dans le temps. Certains mois toutefois, selon qu’ils comportent vingt-neuf ou trente jours, sont appelés "petit mois" ou "long mois".L’ensemble des douze lunaisons totalise un nombre de trois cent cinquante quatre jours, auxquels il manque onze jours pour coïncider avec l’année solaire.

La solution chinoise fut d’intercaler un mois supplémentaire tous les deux à trois ans, qui serait annoncé par l’almanach. Ce mois supplémentaire n’est pas inséré à la fin de l’année lunaire, c’est-à-dire qu’il ne constitue aucunement un treizième mois à proprement nommé. Il est intercalé entre deux autres mois, de sorte qu’il y ait deux sixième mois, ou deux troisièmes mois, etc.... De cette façon le solstice d’hiver tombe toujours dans le onzième mois, l’équinoxe de printemps dans le second, le solstice d’été dans le cinquième et l’équinoxe d’automne dans le huitième.
Pour des considérations astrologiques, le système d’intercalation ne peut s’appliquer entre le douzième et le premier mois, ni dans une période durant laquelle le soleil passe d’un signe du zodiaque à un autre. Il en résulte un calendrier lunaire dont le premier jour de l’année fluctue d’une année à l’autre.

Avant la réforme du calendrier en 104 avant notre ère, certaines dynasties établissaient elles-mêmes le jour du nouvel an car la détermination du calendrier a toujours été une prérogative royale, jalousement gardée, qui supposait parfois des implications politiques. Sous les Zhou (1122 av. JC - 256 ap. JC) il tombait au onzième mois cependant que d’autres états vassaux, utilisateurs de calendriers différents, l’avaient fixé à une toute autre date. Dès lors, au moment de la réforme du calendrier, on établit que l’année commencerait à la première lune qui suivrait la sortie du soleil du dernier des trois signes hivernaux, le capricorne. Le jour de l’an tombe ainsi toujours entre le vingt-et-un janvier et le douze février (d’après le calendrier solaire).

Depuis cette première réforme, il y eut très peu de changements dans le calendrier, jusqu’à ce que la République de Chine ait définitivement adopté en 1912 le calendrier grégorien. Dans le même temps, il fut décidé de donner au nouvel an le nom de fête du "printemps", de manière à différencier le nouvel an occidental avec le nouvel an chinois, puisque sa date de célébration resterait celle du nouvel an lunaire, qui ouvre précisément la saison printanière.

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