Culture et identité

Sur les traces de la liberté à Piton-Rouge

Souvenir de la révolte de 1811 à Saint-Leu

10 novembre 2003

Depuis mercredi soir et jusqu’à aujourd’hui, le collectif associatif saint-leusien nous rappelle le souvenir d’une des manifestations réunionnaises de résistance à l’esclavage. Le 5 novembre 1811, ils étaient nombreux à s’être levés contre cette injustice dans une révolte qui sera sévèrement réprimée, 37 ans avant l’abolition de l’esclavage. Dans le cadre de ces manifestations, une marche était organisée vendredi dernier. Elle menait à un des hauts lieux du marronnage dans notre pays : le Piton-Rouge.

Dans le cadre de la commémoration de la révolte du 5 novembre 1811, le collectif associatif saint-leusien organisait vendredi une marche sur les lieux de vie des marrons, à Piton-Rouge, dans les hauts de la commune de l’Ouest.
Au-delà de la forêt de tamarins se trouve un espace marqué par l’austérité du climat de la haute altitude, et pourtant, c’est ici que des Réunionnais se sont réfugiés, ont vécu et sont morts libres.
Vendredi, une quinzaine de randonneurs se sont donnés rendez-vous à Saint-Leu. Après une heure de bus, le départ du sentier au niveau de la ravine Bras-Sec. Là se trouvent des pierres gravées porteuses d’explication quant à la vie des marrons, plus particulièrement l’un d’entre eux, le roi Phaonce, un de leurs dirigeants. À l’époque où La Réunion était appelée Bourbon, du temps où les dirigeants du pays imposaient un ordre raciste pour perpétuer l’esclavage, plusieurs Réunionnais se sont rebellés contre cette injustice. Des révoltes ont été organisées - c’est le cas de celle de Saint-Leu - et ont été sévèrement réprimées. Mais dans notre pays, l’acte le plus connu de résistance à l’esclavage est celui du marronnage. Des femmes et des hommes décidaient alors d’en finir avec les chaînes et les coups, et, malgré tous les risques encourus, ils s’évadaient.

Un lieu habité

Devant l’organisation de la répression, le chemin de la liberté menait toujours plus loin. Piton-Rouge en est l’illustration. Pour se libérer des travaux forcés et des humiliations, il fallait aller à 2.400 mètres d’altitude, au-dessus des nuages. Piton-Rouge est un cône volcanique rouge qui se dresse sur la planèze. C’est le témoignage d’une des dernières phases active du Piton des Neiges. Il se situe approximativement à mi-chemin entre la Glacière et le Petit Bénare. Son sommet constitue un remarquable poste d’observation. Par beau temps, il est possible de voir tout le littoral Ouest, jusqu’au Cap La Houssaye. Cela permettait donc d’anticiper sur la venue des chasseurs coupeurs de main de plus en plus téméraires. Au terme d’un parcours sans grande difficulté physique, au milieu d’un paysage marqué par l’empreinte d’un gigantesque incendie, sous un grand soleil qui fait ressortir les couleurs, les randonneurs atteignent ce premier lieu de mémoire. Au pied du cône de scories, des pierres disposées en forme de rectangle. Dans cette terre sont enterrés des ancêtres qui sont morts libres. Une croix apportée bien plus tard en marque l’emplacement. Un peu plus loin, une trace de champ cultivé avec des pommes de terre minuscules, nourriture supposée des marrons.

Lieu de liberté

La marche se poursuit alors en direction du Petit Bénare, jusqu’à la grotte du roi Phaonce, une petite caverne qui servait probablement de lieu de vie. Alors que le soleil atteint son zénith, le repas est partagé.
C’est alors que les instruments de musique s’animent et donnent vie à un maloya, hommage à nos ancêtres qui habitaient ce lieu de liberté. Au son du bobré et de la mok en tôle, les notes s’égrènent jusqu’à l’heure du départ. Un dernier regard sur la tombe du roi Phaonce puis retour au Piton-Rouge, au sommet duquel se trouve la place du Bicentenaire de Saint-Leu, un lieu aménagé en 1990. Sont ici exposées des œuvres du sculpteur Gilbert Clain, malheureusement vandalisées. Après un bref débat sur cette agora improvisée, c’était l’heure du retour, après s’être imprégné une dernière fois de ce sentiment de liberté, propre à un paysage qui s’étend à perte de vue avec le ciel pour seule limite.


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