Il était une fois... Evariste de Parny - quatrième partie



Le poète confronté à La Révolution française

2 septembre 2008, par Georges Gauvin



Evariste de Parny a montré dans ses écrits qu’il ne partageait pas les idées esclavagistes et colonialistes dominantes de son vivant. C’est ainsi qu’il a pris parti pour les "insurgents" de Boston et que dans l’épître à leur adresse, il ne s’est pas privé d’attaquer les régimes qui privaient les peuples des droits les plus élémentaires. C’est ainsi également que dans les chansons madégasses, il attaque les esclavagistes européens : il n’hésite pas à écrire dans une des chansons madégasses la phrase suivante : « habitants des rivages, méfiez-vous des blancs ». En 1789, la première révolution éclate en France. Quelle sera alors son attitude vis-à-vis de ces évènements ? 

Un partisan des idées révolutionnaires.

 Quand la révolution éclate, Evariste se trouve à Paris. C’est alors qu’il écrit notamment à sa sœur, restée dans l’île de France (Ile Maurice), un certain nombre de lettres qui ne sont révélées au public qu’en 1930 par Raphaël Barquisseau, lequel doute des idées révolutionnaires du poète. Barquisseau écrit, en effet : « Il était fait pour naître vingt-cinq ans plus tôt, ... fréquenter Voltaire et les encyclopédistes et promener une vieillesse adulée, insoucieuse et charmante qui n’eût ni subi Robespierre, ni sollicité Bonaparte ». 
Pourtant, Chateaubriand, qui avait une grande admiration pour les élégies de Parny et les avait apprises par cœur, parlait de lui comme d’un « misérable révolutionnaire ». On a même pensé qu’il vice-présidait le tribunal révolutionnaire dont le président était Fouquier Tinville qui fit tomber tant de têtes dans la sciure de bois de l’échafaud. Mais ceci n’est pas prouvé jusqu’aujourd’hui. 
On sait par contre qu’il partageait les idées de Voltaire et de Rousseau, qu’il croyait en l’Etre suprême et qu’il a écrit un recueil à la fois anti-clérical et même anti-religieux : "La Guerre des Dieux anciens et modernes". Cette œuvre a connu un succès retentissant avec six rééditions dans un temps très court, mais n’a pas fait que des amis à notre compatriote. On a prétendu que Chateaubriand a même écrit son “Génie du christianisme" en réplique à la guerre des dieux de Parny, 

L

Le discours de réception de Parny à l’Académie.

En 1801, Napoléon Bonaparte devient premier Consul et il signe le concordat avec le Pape Pie VII. A cette occasion, il renie la constitution civile du clergé, laquelle avait tant divisé le clergé français en clergé "jureur" et clergé "non jureur" ; les jureurs étant ceux qui avaient accepté de prêter serment.
En 1802, lorsque Parny est élu à l’Académie française, le discours de réception est prononcé par Garat, un fidèle aux idées des révolutionnaires. Garat va s’appuyer sur les écrits de Parny pour mener une attaque feutrée, mais ferme, contre la politique de Napoléon dans le domaine religieux. C’est ainsi que l’orateur en vient, lorsqu’il aborde l’ouvrage "La Guerre des dieux", à déclarer ceci : « Le silence devenu plus profond dans cette enceinte à ce seul mot de "Guerre des dieux" est un effet qu’il m’a été facile de prévoir ; je n’ai pu le redouter ni pour vous, ni pour moi (...). En composant ce poème, en le publiant, et le signant, vous n’avez pas sans doute tenté de vous promettre des succès sans regret et des triomphes sans douleur ». Il ajoute également : « Le dieu de l’évangile et du chrétien... est un dieu de vérité et c’est aussi à la vérité et à l’être éternel dont il est l’émanation et pour ainsi dire la parole que le vrai philosophe adresse ses hommages et son amour ». 

Un discours qui n’est pas sans conséquence.

 A cette époque, l’assignat*, monnaie de la France révolutionnaire, a beaucoup perdu de valeur. Parny, dont le domaine en France a été nationalisé, est ruiné ; Certes, il bénéficie de l’aide de certains bienfaiteurs et d’emplois médiocres dans l’administration, mais pas d’une pension de l’empire. Bonaparte, contacté par Lucien, son frère, afin de faire verser une pension à Parny, s’y est opposé jusqu’en 1813. Mais notre compatriote meurt en décembre 1814 et ne profite, par conséquent, pas longtemps de cette pension de 3.000 livres. 
Il faut dire que Garat avait su, dans son discours de réception de Parny à l’académie, presque lancer un appel à renverser ce nouveau Catilina qu’était l’empereur : Parmi les propos de l’académicien, on peut retenir ceux-ci, qui n’étaient pas faits pour plaire à Napoléon : « Quelles que soient nos croyances à nos doctrines, tout ce qui porte sur la terre le nom d’homme et qui en est digne doit s’écarter avec effroi de ces ennemis de la raison et de l’humanité, pour les laisser seuls sur les bancs d’ignominie, sur cette sellette où ils se sont placés d’eux-mêmes, et où il faut qu’ils restent exposés ».



*assignat : les révolutionnaires ont nationalisé les terres du clergé et de la noblesse et ces terres ont servi d’étalon à la nouvelle monnaie. Les ex-propriétaires se sont vus remettre de la monnaie de papier qui s’est vite dépréciée, ruinant ainsi ses détenteurs.

G. Gauvin


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