Réchauffement

Le changement climatique aura des conséquences sociales et économiques

Entretien avec le président du G.I.E.C.

8 mars 2003

Le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) a convoqué, mercredi 19 février, sa vingtième session plénière à Paris. Jusqu’au 21 février, près de 350 spécialistes ont élaboré, pour leur prochain rapport de 2007, de nouvelles orientations. Ces dernières, explique au ’Monde’ Rajendra Pachauri, président du GIEC, devront désormais évaluer les phénomènes climatiques « sur les plans économique et social ».
Malgré des incertitudes, les enjeux scientifiques du réchauffement climatique sont en effet connus. Des scientifiques français et américains viennent ainsi de mettre en évidence le rôle de la salinité de l’eau des océans dans le déclenchement du phénomène climatique El Niño. Quant aux répercussions sur la faune, elles sont également de mieux en mieux appréhendées. Nous reproduisons ci-après un entretien paru dans ’le Monde’ du 21 février dernier.

Quel est l’état de la connaissance scientifique sur le changement climatique ?
Rajendra Pachauri : Depuis les rapports du Groupe intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) de 1990 et de 1995, la compréhension du système climatique s’est beaucoup améliorée. Il y a un fait que nous ne pouvons ignorer : la concentration de gaz à effet de serre dans l’atmosphère est à niveau jamais atteint depuis sans doute dix millions d’années. Et cela devrait provoquer un réchauffement allant de 1,4 à 5,8 degrés d’ici un siècle, ce qui et énorme.
Une chose est importante : l’impact du changement climatique en sera pas uniforme sur tout le globe, en raison des différences de fonctionnement du cycle de l’eau et des précipitations ici et là. Par exemple, il se pourrait que dans l’hémisphère Nord on note un accroissement des précipitations en hiver, sous forme de pluies plutôt que de neige, ce qui multiplierait les possibilités d’inondation. Et faute de neige en hiver, il y aurait moins d’eau au printemps et les sécheresses pourraient se produire en été.

Que pensez-vous des critiques de la théorie du changement climatique ?
Il y a environ trois cent ans, une Société de la Terre plate a été fondée par ceux qui ne croyaient pas à la rotondité de la planète. cette société existe toujours, elle doit compter une dizaine de membres.

Quelles sont les principales incertitudes ?
Nous ne savons pas avec précision où est absorbé le gaz carbonique émis par l’humanité : dans les océans, dans la végétation, mais combien ? Un autre domaine d’incertitude est celui des impacts régionaux du changement climatique. Les pays devront agir et changer leur politique dans leur région. Une troisième incertitude porte sur le cycle de l’eau : nous ne savons pas exactement dans laquelle mesure le régime des précipitations va être affecté, non seulement dans leur volume, amis aussi dans leurs variations d’année en année.

Le protocole de Kyoto ne suffira pas à stabiliser la concentration des gaz à effet de serre dans l’atmosphère. Qu’en est-il ?
C’est exact. Le protocole représente un pas important, parce que pour la première fois un grand nombre de pays ont décidé de mener une action collective dans ce domaine. Mais pendant toutes ces années on s’est focalisé sur ce traité, sans prêter attention au but à long terme, qui est de stabiliser cette concentration. Même si nous arrivons à stabiliser les émissions de gaz d’ici vingt ou vingt-cinq ans, le changement climatique continuera pendant un siècle. Si nous réalisons quelque chose aujourd’hui, ce n’est pas suffisant.

Comment le travail du GIEC va-t-il évoluer dans les prochaines années ?
Nous allons approfondir les parties du rapport du GIEC, qui concernent les impacts socio-économiques du changement climatique et les moyens de les atténuer. Il y a là de grandes incertitudes. Par exemple, nous ne savons pas ni le coût qu’entraînerait l’inondation par la mer de 20% du territoire du Bangladesh ni quel effet cela aurait sur la société. Il nous faut comprendre ces phénomènes, les évaluer sur les plans économique et social. Les spécialistes de la science atmosphérique ont jusque-là prédominé dans l’étude des changements climatiques, alors que les sciences sociales ne s’y sont pas assez intéressée. De même, nous n’avons pas assez travaillé sur la technologie : quels choix technologiques aurons-nous dans le futur ? Quelle politique énergétique faudra-t-il développer ? L’action concrète dans les différents pays ne pourra se faire que si les gens comprennent ces enjeux.

Votre travail deviendra-t-il plus politique ?
Nous ne devons pas être des prescripteurs de bonne politique, nous sommes là pour proposer des options. Nous devons par exemple être capables de dire, si l’on développe les piles à combustible à tel coût en 2015, voilà quel en sera le bénéfice ; si l’on développe les cellules photovoltaïques ou les centrales électriques solaires, le prix peut en être diminué jusqu’à tel niveau, voilà quel en serait l’effet. Mais notre rôle n’est pas de recommander des choix.

Le changement climatique influe-t-il sur la politique de l’Inde ?
Le gouvernement devient vraiment concerné par le sujet. Les parlementaires ont constitué un forum sur l’environnement. Mais on n’en fait pas assez, en Inde comme dans les autres pays "en développement". La connaissance du problème n’est pas assez diffusée et il y a réel déficit d’éducation. Nous avons aussi besoin de partenariats pour trouver des technologies nouvelles.

L’Inde ou la Chine pourront-elles ne pas utiliser leurs réserves de charbon ?
C’est très peu probable. Mais nous devons utiliser le charbon avec des technologies très différentes. Par exemple, on pourrait le gazéifier, ce qui produit moins d’émissions. Et utiliser ce gaz dans des centrales à cycle combiné, qui ont un rendement bien meilleur que les centrales électriques à charbon. Il faut donc développer de technologies propres.

George W. Bush à la Maison Blanche : un danger sans précédent pour la planète
La guerre va augmenter l’effet de serre
Réunis au Sommet des non-alignés, les représentants de la majorité des peuples du monde se sont prononcés contre la guerre. L’Union africaine a adopté la même position lors de de la deuxième session ordinaire de son Conseil exécutif jeudi à N’djaména.
Aux Nations Unies, les dirigeants américains peinent à faire basculer la majorité des membres du Conseil de sécurité dans le camp du chaos. Malgré tout, George Bush et ses alliés sont prêts à déclencher une guerre aux mépris des décisions de l’ONU. Une telle politique fait courir un danger sans précédent pour la planète. Tout d’abord, la politique de la Maison-Blanche risque de faire exploser la communauté internationale : une menace sans précédent depuis Hitler et Mussolini. Ensuite, si George Bush arrive à concrétiser les rêves des industriels et des militaires qui l’ont amené au pouvoir, la mainmise américaine sur une grande partie des réserves pétrolières mondiales par la conquête de l’Irak va favoriser la croissance de la consommation pétrolière de la part du premier pollueur de la planète. Depuis son arrivée au pouvoir, le président des États-Unis a pris plusieurs décisions qui visent à privilégier l’utilisation accrue de sources d’énergie fossile. L’une d’entre elles est le refus de ratifier le Protocole de Kyoto. Or aujourd’hui, s’ils représentent environ 5% de la population mondiale, les États-Unis consomment 25% du pétrole extrait de la planète. En cas de guerre et d’issue victorieuse pour Washington, cette proportion a toutes les chance d’augmenter. Mais est-ce étonnant si l’on sait que plusieurs postes clés dans l’administration américaine sont détenus par des personnes liées directement à l’industrie pétrolière de ce pays.
Le vice-président Dick Cheney est l’ancien directeur d’Halliburton, le plus grand prestataire de services pétroliers du monde. George W. Bush et sa famille sont liés aux compagnies pétrolières depuis l’époque de son grand-père. Condoleezza Rice, la conseillère pour la sécurité nationale de Bush, a siégé au conseil d’administration de Chevron. Et la liste est encore longue...
Conséquence : les compagnies pétrolières cherchent également à récupérer leur investissement. Plusieurs d’entre elles ont largement contribué au financement de la campagne présidentielle de George Bush. Parmi ces grandes entreprises, la compagnie américaine ExxonMobil a travaillé dur pour entretenir la demande de pétrole en faisant pression sur le gouvernement américain pour qu’il se retire du Protocole de Kyoto. D’autre part, ExxonMobil n’a pas pu avoir accès aux puits de pétrole irakiens à cause de la position politique des États-Unis ces dix dernières années. Exxon possédait auparavant 25% des champs de pétrole irakiens. Une nouvelle guerre contre l’Irak lui donnerait de nouveau accès aux vastes réserves pétrolières du pays.
On ne peut que s’inquiéter des conséquences d’une telle éventualité. Car pour tous ces "barons" du pétrole, le développement durable est un mot inconnu. Il s’agit pour eux de rentabiliser au maximum le placement de leurs actionnaires en exploitant intensivement les moindres réserves. Une fois le pétrole extrait, il s’agit de le vendre. Les porte-avions nucléaires américains sont là pour garantir la sécurité des liaisons maritimes pour les supertankers. Arrivé dans le lieu de consommation, le produit a besoin d’être raffiné, c’est là aussi un moyen de faire tourner l’industrie pétrolière américaine. Enfin, le pétrole raffiné est consommé.
En annulant plusieurs mesures destinées à rendre les automobiles moins polluantes aux États-Unis, George Bush évite aux constructeurs d’investir davantage dans la recherche, et empêche toute émergence d’un moyen de transport utilisant une source d’énergie alternative à l’essence.
Tous les efforts faits par les autres pays afin de réduire les émissions de gaz à effets de serre risquent d’être compromis par l’augmentation des rejets en provenance des États-Unis. Une situation qui risque d’aggraver le réchauffement climatique et qui fait courir un danger sans précédent pour la planète.
M.M. 

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