L’espace pour tous

Des parcelles d’ADN humains bientôt mis en orbite lointaine

28 décembre 2023, par Kalouma

Science-Réunion a fait paraître mardi dans les média de l’île un communiqué annonçant l’expérience unique que s’apprête à vivre l’ingénieur réunionnais Guy Pignolet, parti hier pour Cap Canaveral. Cette aventure a une histoire. La voici.

L’histoire commence il y a 20 ans, quand Guy Pignolet apprend qu’il doit être opéré du cœur, un triple pontage, une opération lourde dont il n’était pas sûr à 100 % de se réveiller, d’après les avis des médecins.
Cette incertitude et les mille questions qu’elle a fait naître ont rappelé à l’ingénieur réunionnais une rencontre qu’il avait faite quelque temps avant, au CNES, où il travaillait alors.
Un entrepreneur de pompes funèbres parisien était venu chercher la coopération de la fusée européenne Ariane pour son projet : faire voyager dans l’espace, en orbite terrestre, lunaire ou beaucoup plus loin, une petite partie des cendres de ceux et celles qui passeraient contrat avec l’Autre Rive, l’entreprise en question, en association avec l’entreprise américaine Celestis, pour un dernier voyage parmi les autres poussières d’étoiles.
Le projet avec la fusée Ariane n’a pas eu de suite, mais Guy Pignolet s’est souvenu de sa rencontre avec Raphaël Confino, alors directeur de l’entreprise, et s’est dit que, s’il ne se relevait pas de la table d’opération, il pourrait au moins réaliser, une fois mort, le rêve que la vie ne lui avait pas donné de vivre en pleine conscience : quitter la Terre et découvrir les grands espaces étoilés.
Le voilà donc inscrit, depuis 2003, pour un dernier voyage en orbite basse autour de la Terre.

La Terre tourne et tourne encore. Les années passent. Guy Pignolet garde en permanence sur lui le n° de téléphone de l’entreprise qui organisera son ultime expédition le moment venu. Après son passage de 25 ans au CNES, il maintient à La Réunion une activité soutenue d’éducateur spatial, d’éveilleur de consciences à notre condition de « Solariens » autant que « Terriens ».
« Nous sommes les enfants d’une étoile » aime-t-il à dire.
Cette condition de Solariens implique de nouvelles responsabilités pour l’humanité : en prenant conscience des ressources immenses du Système Solaire — ressources auxquelles nous fait accéder la « Haute Frontière » ouverte par la conquête spatiale — elle peut réorienter ses activités, cesser d’épuiser les ressources naturelles terrestres et transformer son économie pour la mettre enfin au service de projets collectifs bienfaisants.
Nos technologies d’aujourd’hui le permettent. Le malheur est qu’elles sont encore trop souvent dans les mains de dirigeants ayant, en politique, la maturité d’un enfant de 5 ans.
Néanmoins, tous ceux qui savent quel immense potentiel l’aventure spatiale ouvre à l’humanité, savent opportunément joindre leurs efforts pour réaliser des avancées majeures. L’histoire de l’aventure spatiale depuis 1957 est jalonnée de coopérations de cette sorte.

C’est ce qu’ont fait, en septembre dernier, une soixantaine d’organisations et structures de l’activité spatiale, en présentant au siège des Nations-Unies, à New-York, le contenu d’un 18e Objectif de Développement Durable capable d’accélérer considérablement la réalisation des 17 autres objectifs, à atteindre d’ici 2030.
Guy Pignolet comptait évidemment parmi les promoteurs de cette initiative avant-gardiste (voir Témoignages des 4 et 15 septembre 2023).

Or cet événement public a aussi donné un rebond inattendu à l’initiative plus personnelle qu’il avait prise 20 ans plus tôt. Alors qu’il se trouvait à New-York en septembre dernier, l’entreprise Celestis l’a informé d’une possibilité nouvelle : envoyer de son vivant une parcelle de son ADN (une mèche de cheveux avec leur racine) encapsulée à bord du vol inaugural de la fusée Vulcain Centaur.
Ce vol inaugural — qui devait avoir lieu en mai 2023 — a été reporté, à la suite d’un incident technique, d’abord au 24 décembre 2023, puis au 8 janvier 2024. Et voilà comment l’aventure personnelle d’un pionnier devient une expérience sociétale inédite pour La Réunion et au-delà.
L’ADN étant une des composantes de la vie les mieux partagées, avec chaque parcelle installée à bord, ce sont des pans entiers et concrets de l’humanité qui partent pour la Haute Frontière !
A l’échelle d’un individu, l’expérience a un aspect troublant : ceux qui seront physiquement présents lors du lancement pour voir s’envoler une partie d’eux-mêmes vers les hautes sphères vont vivre un moment quantique inoubliable ! Guy Pignolet n’évoque-t-il pas un « dédoublement de personnalité » ?
Mais l’expérience a aussi une dimension beaucoup plus large, qui engage l’humanité à de nouvelles responsabilités, avec de nouveaux pouvoirs. Puisse-t-elle en prendre conscience plus rapidement pour agir en conséquence.

Kalouma


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