Yanis Varoufakis fait le point au lendemain de la démission du gouvernement conduit par Syriza

La grande majorité du peuple grec trahie

22 août 2015

Yanis Varoufakis est l’ancien ministre des Finances de la Grèce. Entre janvier et juillet, il a conduit les négociations avec l’Union européenne, la Banque mondiale et le FMI au sujet de la dette de la Grèce. Il a choisi de démissionner au lendemain du succès du « non » au référendum sur un énième plan d’austérité imposé à la Grèce, car il ne voulait pas appliquer une politique qui allait à l’encontre de la volonté populaire clairement exprimée. Au lendemain de la démission du Premier ministre et du gouvernement, alors que la Grèce se dirige vers des élections législatives, le député de Syriza rappelle à l’Obs quelques éléments importants pour comprendre la crise. Voici des extraits de l’interview paru chez notre confrère, avec des inter-titres de Témoignages.

« Si les élections anticipées débouchent sur un gouvernement et un parti qui auront reçu un mandat populaire pour appliquer l’accord du 13 juillet, je ne pourrai évidemment pas en faire partie. Alexis Tsipras est rentré du sommet européen du 12 juillet, où nous avons assisté de fait à la capitulation du pays, en expliquant son positionnement. Celui-ci reposait, selon lui, sur un grave dilemme : soit on acceptait ce programme non viable, soit le plan Schäuble [le ministre allemand des Finances, NDLR] de "défenestration" de la Grèce de la zone euro était mis en action. C’est là que commence ma principale objection : je ne crois pas que le dilemme soit là. Je crois que le "plan Schäuble" est en train de se réaliser. C’est en votant "non" au référendum que je reste fidèle au programme de Syriza. Si je suis d’accord avec Alexis Tsipras pour dire que le Grexit doit être évité, selon moi, le maintien de la Grèce dans la zone euro passait justement par le rejet de ce nouveau et troisième mémorandum. C’est là que nos opinions divergent. Alexis [Tsipras] considère que cet accord est l’alternative au "Grexit" de Schäuble, moi je considère que ce mémorandum fait partie du plan de Schäuble [de sortie de la Grèce de la zone euro]. »

Sur le référendum du 12 juillet

« La semaine qui a précédé la fermeture des banques, je considérais – et je considère toujours – que nous aurions dû nous opposer à cette décision scandaleuse de l’Eurogroupe. Mais comme nous étions dans la ligne droite qui menait au référendum, il était de notre devoir de rester unis et de travailler pour la victoire du "Non". Et le "Non" l’a emporté. À ce moment-là, j’ai ressenti une immense responsabilité face à ces gens qui ont su s’opposer à toutes les attaques médiatiques contre les partisans du "Non", au moment même où les banques avaient été fermées pour leur faire peur. J’ai considéré alors que notre rôle était d’honorer ce courage. Je suis rentré à Maximou [résidence officielle du premier ministre grec, NDLR] imprégné et motivé par l’énergie de notre très courageuse population et je me suis trouvé confronté à la volonté de capitulation de la part des autres membres de notre groupe politique responsables des négociations. Ma position ayant toujours été de dire : "Je préfère que l’on me coupe la main plutôt que de signer un nouveau mémorandum", mon départ à ce moment s’est imposé à tout le monde comme une évidence. »

Sur l’après-référendum

« Je crois que nous avons trahi la grande majorité (62%) du peuple grec. En même temps, il est évident que ce résultat n’était pas un mandat de sortie de la zone euro. Comme Alexis Tsipras, j’ai toujours été opposé à ce scénario, même si je critique avec virulence l’architecture de l’eurozone. C’est d’ailleurs la raison principale pour laquelle j’ai été nommé ministre des Finances. Mais à travers ce référendum, le peuple nous a clairement dit : "Battez-vous pour un meilleur accord, et si l’on vous menace de Grexit ou de tout autre catastrophe, n’ayez pas peur." (...)
Laissez-moi plutôt poser une autre question, que j’ai soumise aux membres de l’Eurogroupe en poussant leur raisonnement jusqu’au bout : "Ne serait-il pas mieux d’abolir les élections pour les pays se trouvant dans un programme d’aide ? Cela aurait le mérite d’être clair. Nous pourrions déclarer par la suite que nous avons créé une union monétaire en Europe qui abolit la démocratie pour les pays ayant une dette qu’ils ne peuvent pas rembourser". Comme vous l’aurez compris, la discussion s’est arrêtée là... Par ailleurs, mes opposants les plus farouches, au-delà de Schäuble, ont été les pays ayant imposé à leurs populations des cures d’austérité très dures. Quand on sait, par exemple, qu’en Lettonie la moitié de la population a dû s’expatrier à cause de la cure d’austérité imposée au pays, il est prévisible que les dirigeants lettons ne veuillent pas s’exposer à la vindicte populaire en laissant le gouvernement grec démontrer qu’une autre voie existe. »

Union européenneSyriza

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