Accord de Bruxelles

Les Grecs auront essayé

22 juillet 2015, par @celinetabou

Depuis plus de cinq ans, la Grèce subit les effets de la crise économique et financière, partie des Etats-Unis. Cette crise s’est ajoutée à une économie déjà fragilisée par des problèmes structurels internes. Mais, face à l’ampleur de la situation, la solidarité européenne a été invoquée pour pouvoir sortir de la crise.

Manifestation de Grecs contre l’austérité. C’était avant l’arrivée de Syriza à la direction du pays.

Cependant, en dépit de huit plans d’austérité, l’économie grecque ne se relève pas. D’ailleurs, le FMI, lui-même, reconnaîtra que les plans imposés n’ont pas fonctionné. La Grèce reste encore aujourd’hui, avec son 9ème plan en perspective, le laboratoire des politiques ultralibérales. Des politiques visant à tester la capacité de résistance d’un pays, à la fois sur le plan social, politique et économique.

Aujourd’hui, le gouvernement grec souhaite finaliser l’accord avec les créanciers sur le nouveau prêt au pays d’ici le 20 août, a indiqué ce mardi 21 juillet la porte-parole du gouvernement Olga Gerovassili. Une volonté d’aller vite, après les trois semaines d’angoisse, dues à la fermeture des banques et aux menaces des Allemands et dirigeants européens.

L’espoir d’un peuple, d’une Europe

Ainsi, après des années de contestation et de manifestation contre l’austérité, imposée par la troïka (FMI, BCE, UE), les Grecs disent stop et mettent au pouvoir un parti d’extrême gauche, Syriza. En dépit, d’une victoire propre (149 sièges sur 300), le parti d’Alexis Tsipras, Premier ministre, a du se plier aux directives de ces voisins européens.

C’est alors que la dette des banques grecques est devenue une dette publique, payée par l’ensemble des contribuables, non pas pour sauver leur système bancaire, mais pour sauver celles de la France et de l’Allemagne. En effet, comme l’a expliqué, Paulo Batista, élu du conseil d’administration du FMI, interviewé par la chaîne grecque Alpha Tv, cité par Marianne : « L’argent a été donné pour sauver les banques françaises et allemandes, pas la Grèce. »

Malgré cette réalité, le contexte social et économique reste drastique, austère et tendu. Mais, alors apparait une nouvelle formation politique sur la scène politique grecque, puis européenne. Syriza. Créé en 2004, ce parti réunit les partis de gauche et d’extrême gauche, rassemblant 13 formations politiques, des économistes et politiciens indépendants, mais aussi des communistes pro-européens, des écologistes, des socialistes et des eurosceptiques. En 2009, apparaît Alexis Tsípras, charismatique homme politique qui porte la voix de la Gauche dans toute l’Union, devient président de cette coalition en 2009. Il fonde le parti Syriza, en 2013.

Ce parti anti austérité fait alors peur à la troïka, pour ses positions nette sur le remboursement de la dette, considéré “illégitime”. D’ailleurs, avant les élections de janvier 2015, Panos Skourletis, porte-parole de Syriza, expliquait sur Euronews que « l’Europe ne devrait pas avoir peur de partis comme Syriza, si elle doit avoir peur de quelque chose, c’est d’elle-même. Je me réfère aux politiques stratégiques dominantes d’extrême austérité, qui ont été imposées principalement par la principale puissance : l’Allemagne ».

De son côté, Alexis Charitsis, membre du secrétariat de Syriza, expliquait au magazine Regards que « le programme de la Troïka et du gouvernement grec ont été un échec budgétaire total avec des conséquences sociales dévastatrices. Eux-mêmes ont dû l’admettre dans les évaluations périodiques qu’ils ont effectuées ».

Le parti avait alors le souhait d’annuler le mémorandum imposé par la troïka, visant à faire des économies et réformes pour obtenir un plan d’aide. Le parti radical de gauche assurait une renégociation de la dette et l’instauration de nouvelles négociations pour un moratoire sur le remboursement de la dette.

Plusieurs propositions étaient évoquées : un audit de la dette, renégocier les prêts contractés et indexer les taux d’intérêts de la dette sur le taux de croissance, nationaliser les banques, créer un mécanisme de contrôle des dépenses publiques, geler les réductions des dépenses sociales et mettre fin aux mesures prises à l’encontre des intérêts des travailleurs.

D’autres propositions, sur la fiscalité et la relance de la production sont mises en avant, comme la réduction de la TVA pour les produits de première nécessité, annulation des taxes spéciales, particulièrement pour les personnes sans emploi et les retraités, l’établissement d’une liste des Grecs plaçant leur argent à l’étranger pour les taxer, mais aussi exploiter les ressources naturelles et minières, réduire la TVA sur les activités touristiques, soutenir la production agricole par des prêts à taux faibles et enfin, lutter contre la corruption dans le secteur public et entre les médias et l’Etat.
En dépit d’un programme politique, clair et efficace. La situation ne parvient pas à s’inverser.

Un accord difficile à encaisser

Les semaines de tension entre le gouvernement grec et les représentants européens n’auront pas servi à faire peser la balance dans le camp grec. Vendredi 10 juillet, les 28 pays de l’Union européenne ont accordé un financement d’urgence de 7 milliards d’euros à la Grèce, sous la forme d’un prêt, afin de rembourser une échéance de 4,2 milliards d’euros, lundi 13 à la Banque centrale européenne.

Ce prêt durera trois mois, afin que la Grèce puise faire face à ses besoins de financement pendant les négociations qui vont s’ouvrir sur un 3e plan d’aide internationale. Le montant de ce plan se situe entre 82 à 86 milliards d’euros sur trois ans, via le fonds de secours de la zone euro, le Mécanisme européen de stabilité (MES).

Pour assurer ce prêt financier, les 28 pays ont fait appel au fonds communautaire, le FESM, relevant de la responsabilité de l’ensemble des Etats membres de l’UE, et pas seulement des pays de la zone euro.

En contrepartie, la Grèce a augmenté la TVA sur toute une série de biens et de services. Pour les denrées périssables, la restauration, les courses de taxi, les préservatifs ou encore les enterrements, la TVA a augmenté de 10 points, passant de 13 % à 23 %. À cela s’ajoute une hausse des cotisations sociales, depuis hier.
Le pays doit se doter d’un code de procédure civile, afin de simplifier et accélérer le fonctionnement de la justice, et d’en réduire les coûts. Ensuite, l’application de la directive européenne de 2013, adoptée lors de la crise à Chypre. Il s’agit de renflouer les banques en difficulté (“BRRD”), via l’intervention des autorités nationales.
Petit bémol, la porte-parole, Olga Gerovassili, a expliqué qu’un accord avait été conclu avec les institutions pour reporter à plus tard la mesure concernant la suppression graduelle des pré-retraites, qui aurait dû être adoptée mercredi 15 juillet.

Pour l’économiste de chez Barclays, François Cabau, cité par Le Figaro, les mesures prévues par l’accord grec coûteront plus cher à l’économie. D’autant plus que la consommation des ménages « était déjà faible avant le plan ». Ce dernier a expliqué que « les mesures du plan (principalement les hausses de TVA et les diminutions de certaines pensions de retraite) ne peuvent qu’aggraver les choses ». D’autant que « la chute de la croissance, entamée fin 2014, devrait donc s’accélérer », a expliqué l’économiste, qui a parié sur un recul de l’activité de 6 % à 8 % en rythme annuel.
De son côté, Alexis Tsipras, avait déclaré avant le vote du Parlement, validant l’accord signé avec Bruxelles : « J’assume mes responsabilités pour toute erreur que j’ai pu commettre, j’assume la responsabilité pour un texte auquel je ne crois pas, mais je le signe pour éviter tout désastre au pays ».

Ce dernier a expliqué que « le message envoyé c’est que la démocratie ne compte pas pour des pays endettés. Il est évident que les conservateurs européens sont mal à l’aise avec un gouvernement – comme le nôtre – qui est différent. » Conscient d’avoir cédé, il a indiqué : « Je suis sûr que certains auraient été contents si ce gouvernement était une parenthèse (politique, Ndlr). C’est une grande responsabilité de ne pas plier », ajoutant que « la position des Européens était dure et vindicative ».

Alexis Tsipras a également dénoncé la position du ministre allemand des Finances Wolfgang Schäuble qui était en faveur « d’un plan B » pour la Grèce, c’est-à-dire la sortie du pays de l’euro. Une attaque justifiée et relevée par de nombreux politiques et économistes.

Un ex-ministre grec devenu icône de la lutte

Ainsi, malgré les tentatives de Yanis Varoufakis, ministre emblématique des Finances, d’éviter de nouvelles réformes drastiques, le Premier ministre, Alexis Tsipras a dû céder aux pressions et surtout aux menaces d’un Grexit, qui pourrait se traduire par une expulsion de la zone euro, décidée par les Allemands.

Les nombreux appels à la “résistance” lancés en mai 2014 auront été vains. Tout comme, la volonté farouche de défier jusqu’au bout la troïka. Syriza a courbé l’échine face à des dirigeants européens intransigeants. À peine débarqué de son poste, l’ancien ministre des finances, Yanis Varoufakis reconnaît ses erreurs et explique les dessous des négociations au sein de l’Euro-groupe : omniprésence des Allemands, manque de démocratie, ignorance des ministres de l’Économie.

Des déboires qui montrent bien que ce sont les politiques qui mènent les politiques économiques, sans connaissance du sujet. L’économiste explique alors que dans les discussions avec les partenaires européens, « il y avait un refus pur et simple de livrer des arguments économiques. (…) Vous mettez en avant un argument que vous avez vraiment travaillé — pour vous assurer qu’il est logique et cohérent — et vous êtes juste face à des regards vides » (Marianne).

Fait le plus marquant pour ce dernier, le rôle central de Wolfgang Schaüble, ministre des Finances allemand. Ainsi, Yanis Varoufakis explique que l’Euro-groupe « est comme un orchestre très bien réglé et [Schaüble] est le directeur. (…) Il y aura des moments où l’orchestre est désaccordé, mais il l’organise alors et le remet dans la ligne ».

Des Allemands, qui faute d’avoir des territoires insulaires, souhaitaient réduire de manière drastique les aides aux Régions Ultrapériphériques, dont La Réunion fait partie. Des Allemands qui n’ont d’ailleurs pas hésité à menacer le Fonds d’aides aux plus démunis.

L’attitude de l’Allemagne en aura choqué plus d’un. Notamment, l’ancien directeur du FMI, Dominique Strauss-Kahn qui n’a pas hésité à pointé du doigt la responsabilité des Allemands, dans la signature de l’accord conclu avec la Grèce. Ainsi, ce dernier a dénoncé le “diktat” allemand, qualifié d’"insuffisant, effrayant, néfaste, mortifère, humiliant, illégitime, inefficace, inadapté ». Les mots n’auront pas été assez dur pour protester contre la mise sous tutelle de la Grèce par l’Allemagne, via l’Union européenne.

L’économie grecque ne devrait pas se relever d’aussi tôt. Car désormais, l’UE et surtout l’Allemagne se traduit par « une victoire idéologique sur un gouvernement d’extrême gauche, au prix d’une fragmentation de l’Union ». Ces derniers ont préféré, selon DSK, « humilier un peuple parce qu’il est incapable de se réformer (…) » plutôt que de préparer un accord consensuel.

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