Union européenne : Quelle stratégie pour les R.U.P ?

Madeleine de Grandmaison à l’écoute des acteurs réunionnais

29 avril 2008

Dans la préparation de la prochaine session du Parlement européen, qui doit se réunir du 19 au 22 mai à Strasbourg, la députée Madeleine de Grandmaison est à La Réunion jusqu’à demain pour prendre l’avis des acteurs économiques et sociaux, et échanger avec eux sur “Quelle stratégie de l’Union européenne pour les R.U.P ?”.

Willy Rosier, attaché parlementaire ; Madeleine Jouye de Grandmaison, députée martiniquaise au Parlement européen ; Paul Vergès, Président de la Région Réunion.
(photo P.D.)

Au cours de son bref séjour, la députée martiniquaise au Parlement européen, Madeleine Jouye de Grandmaison, va rencontrer les présidents de la CCIR et celui de la Chambre d’Agriculture, le président et une délégation du Conseil économique et social (CESR), ainsi que le président de l’Ile de La Réunion-Tourisme, Pierre Vergès, avant d’effectuer une visite du chantier de la route des Tamarins.
Ayant pris le mandat dans le relais de Paul Vergès, elle est venue exprimer « la solidarité de l’Outre-mer » et la nécessité de « faire corps pour que le Sud défende au mieux ses intérêts », dans la perspective de l’après 2013 et de ce qu’il laisse prévoir de diminution des fonds structurels.
Dans son activité de parlementaire, au sein du groupe GUE/NGL, la députée explique qu’elle cherche à faire reconnaître « la valeur ajoutée que les RUP procurent à l’Union européenne » dans de nombreux domaines. « Nous ne devons pas laisser dire et laisser croire que nous serions des danseuses perpétuelles. Nous avons les moyens de ne plus être vus comme des assistés », a-t-elle exprimée hier, devant la presse réunie sans la salle Daniel Pavageau.
La base politique de son mandat est de promouvoir pour l’Outre-mer un développement durable fondé sur la mise en valeur des ressources de chaque territoire. C’est ce qu’elle va faire prévaloir à chaque rencontre avec les différentes instances européennes.

Ces moyens sont notoirement connus et plusieurs des amendements qu’elle a présentés, en ajout au rapport sur la Stratégie européenne pour les RUP, mis au vote le mardi 8 avril à Bruxelles par la Commission “Développement régional” du Parlement européen, ont été adoptés : dans le domaine spatial, les énergies renouvelables et l’autosuffisance énergétique, ou encore la biodiversité. Elle a également pu faire intégrer à ce rapport un amendement soulignant l’importance des services publics pour la cohésion économique, sociale et territoriale des RUP, en particulier dans les domaines du transport aérien et maritime, de la poste, des télécommunications et de l’énergie.
Si la prise en compte du programme Net-BIOME a pu être actée, la députée trouve encore « trop faible » à ce jour l’insertion des RUP dans l’Espace Européen de la Recherche (EER). « Le programme communautaire de recherche est thématique, et si nous ne faisons pas une sensibilisation, les thèmes retenus ne nous concernent jamais », relève Madeleine de Grandmaison.
C’est particulièrement vrai des énergies renouvelables (EnR), a-t-elle expliqué. Si l’éolien ne pose pas de problème particulier, il n’en va pas de même pour d’autres énergies, plus spécifiques aux RUP. « L’Europe n’a pas de volcan exploitable et on ne parle jamais de géothermie », note-t-elle, alors que c’est un domaine dans lequel les RUP n’ont pas de retard. L’usine de Bouillante, en Guadeloupe, apportera bientôt 20% de la production d’électricité de l’île, après 30 ans d’exploitation.
Ces contributions, les RUP peuvent aussi les mettre au service de priorités internationales, en devenant pour l’Europe des laboratoires de pointe dans les domaines du réchauffement climatique et les domaines de recherche déjà cités (biodiversité, EnR...). Paul Vergès a fait observer à ce propos que nous en étions déjà à monter des fermes solaires de 15 MW et qu’elles seraient bientôt trois fois plus puissantes. « A-t-on un message plus éloquent que celui-là pour la Convention de Kyoto ? », a-t-il fait valoir, en soulignant également que ces différents domaines de pointe (biodiversité, technologie de masse ou énergies) représentent pour les RUP le passage d’une économie coloniale à un système complètement nouveau.

Mais l’Europe est soupçonnée de ne penser aux RUP que lorsqu’elle peut en tirer un avantage, sans s’intéresser plus avant aux intérêts des RUP et aux avantages qu’elles pourraient tirer, dans leur environnement, de leur appartenance à l’Union européenne. Permettre aux RUP d’échanger dans de bonnes conditions avec les pays de leur bassin respectif : tel est l’objectif qui fait dire à Madeleine de Grandmaison que « les APE peuvent être une bonne chose », s’ils sont négociés en vue d’accroître des échanges équitables.

D’autres amendements ont été repoussés - pour le développement des Universités, pour la reconnaissance du créole comme langue régionale à part entière et pour une meilleure prise en compte de l’histoire de l’esclavage et du colonialisme.
Elle a également demandé qu’une étude vienne préciser l’impact environnemental et social de la réforme de l’OCM-Sucre. « Nous ne voulons pas d’une politique de l’autruche », a-t-elle dit, ajoutant que l’Europe aurait tort de laisser passer l’occasion d’un bilan mondial.
Ces amendements seront présentés à nouveau lors de la prochaine session plénière, à Strasbourg, le 19 mai. L’ensemble vise à définir une stratégie de développement pour les RUP, dans un contexte marqué par d’importants bouleversements (les APE, les OCM banane et sucre...). « Les RUP doivent pouvoir tirer le meilleur parti des évolutions en cours et d’une stratégie plus offensive », soutient Madeleine de Grandmaison.
Paul Vergès en a appelé à se défaire de cette « force réactionnaire » qu’est la force de l’habitude, pour aller « aux changements que nous dicte l’avenir ». « Il nous faut sortir de la chrysalide - tout papillon qui n’en sort pas, meurt - et faire que cette sortie soit annonciatrice d’un envol... ».

P. David


En bref

Qui est Madeleine de Grandmaison ?

Elue en 2004 sur la liste “Alliance pour l’Outre-mer”, conduite par Paul Vergès, Madeleine Jouye de Grandmaison a pris le relais du Président de Région-Réunion au Parlement européen en décembre 2007. Elle siège avec le groupe GUE/NGL (gauche unitaire européenne/gauche verte nordique) que préside le député communiste Francis Wurtz. « C’est une jeune députée et une vieille militante », a dit d’elle Paul Vergès en la présentant hier. Militante autonomiste martiniquaise depuis une quarantaine d’années, elle préside notamment dans son île le Comité du Tourisme et est venue accompagnée d’un de ses attachés parlementaires, Willy Rosier.
Paul Vergès rappelait hier que son premier contact avec Renaud Jouye de Grandmaison, qui deviendrait plus tard le mari de Madeleine Nol, datait de l’époque où ce militant martiniquais comparaissait devant la Cour de Sûreté de l’Etat, à Paris, dans ce qui est connu comme le procès des militants de l’OJAM (Organisation de la Jeunesse Anticolonialiste Martiniquaise, créée en septembre 1962). Inculpé « d’atteinte à l’intégrité du territoire » pour avoir revendiqué l’autonomie, il eut comme “témoin de moralité” Aimé Césaire et Paul Vergès, lequel venait lui-même de bénéficier d’un non-lieu devant la même Cour après avoir comparu au Fort-de-l’Est (La Courneuve), sous la même inculpation. La Cour s’est limitée à constater que l’autonomie était une possibilité constitutionnelle...

Une circonscription, trois sections

Comme Paul Vergès, Madeleine J. de Grandmaison a soulevé la question de la circonscription unique pour tout l’Outre-mer, lequel s’étend sur 3 océans et 18 fuseaux horaires.
Une proposition de loi déposée par Paul Vergès a demandé la création de 3 sections d’Outre-mer. La nouvelle loi, tout en maintenant une seule circonscription, reconnaît 3 sections qui seront présentes dans chaque liste. Le système de répartition des suffrages fera que chaque section sera représentée, ce qui n’était pas le cas dans le précédent mode de représentation.
En 2004, les 3 élus d’Outre-mer étaient 3 Réunionnais : Margie Sudre, Jean-Claude Fruteau et Paul Vergès - ce qui découlait du fait que nous sommes le territoire le plus peuplé. Puis Paul Vergès, à la moitié de son mandat, a “remis le témoin” à la Martiniquaise Madeleine J. de Grandmaison - par solidarité, comme il s’y était engagé pour compenser le déséquilibre de représentation -, tandis que Jean-Claude Fruteau, élu en 2007 député à l’Assemblée nationale, s’est désisté pour cumul de mandats en faveur de Catherine Néris, elle aussi Martiniquaise.
De sorte que l’Outre-mer est actuellement représenté par 3 femmes - Margie Sudre, Catherine Néris et Madeleine Jouye de Grandmaison - issues de 2 “sections”, Atlantique et Océan Indien. C’est ce déséquilibre de représentation que tend à corriger la nouvelle loi amendée.

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