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Entretien avec l’anthropologue Dounia Bouzar
25 avril 2008
Le débat sur la manière d’endiguer et de combattre le terrorisme reprend de la vigueur depuis la diffusion sur Internet du film brûlot du député néerlandais d’extrême droite Geert Wilders : 16 minutes de haine et de bêtise pures qui ont déjà mis dans la rue plusieurs centaines d’étudiants indonésiens et qui mettront le monde à feu et à sang si les démocrates ont la faiblesse de se laisser terroriser par ses “arguments”. Il en est d’autres, heureusement.
Tels ceux de Dounia Bouzar, anthropologue du fait religieux dont les travaux mettent en lumière certaines incohérences liées au discours sur l’intégrisme religieux en France. Son dernier ouvrage : “L’intégrisme, l’Islam et nous, on a tout faux ! », (Plon, 2007) est une sonnette d’alarme afin que cessent les préjugés et les raccourcis liés au fait musulman. L’interview publiée ici est parue sur le site de Saphirnews).
Vous dites que depuis le 11 septembre tout le monde croit savoir ce qu’est l’intégrisme ?
- Oui, parce qu’il s’est présenté à nous sous forme d’image spectaculaire, avec le nom de Ben Laden. Du coup, tout le monde s’est concentré sur cette “tête de réseau” et sur ce qu’il instrumentalise : la religion musulmane. Pourtant, présenter l’intégrisme comme l’application littérale de l’islam, c’est se fourvoyer d’emblée. Cette erreur sert l’intégrisme, puisqu’elle fait l’économie des procédés et des raisons d’endoctrinement. L’intégrisme est d’abord un processus d’extension externe et de purification interne. Il instrumentalise comme il pourrait utiliser n’importe quelle autre religion, et même une idéologie politique.
Un processus de purification interne, dites-vous ?
- Oui, puisque que les populations musulmanes sont les victimes les plus nombreuses de l’intégrisme !
C’est pour cette raison que vous affirmez que l’arsenal militaire ne vaincra pas l’intégrisme ?
- Oui, la haute technologie ne combat pas l’idéologie. L’aspect matériel ne doit pas primer sur le psychologique. C’est pour ça que j’ai voulu étudier les rouages du processus...
Vous expliquez que si la religion fait lien entre les humains, l’intégrisme, au contraire, transforme les religions en frontières ?
- C’est exactement ça ! L’intégrisme fabrique des frontières strictes pour séparer les uns des autres par l’intermédiaire de la religion. Son objectif consiste avant tout à construire des séparations infranchissables. Pour cela, il réduit l’islam à un ensemble de codes et de normes, qui isolent ceux qui sont dedans de ceux qui sont dehors. Une certaine codification inhérente à leur groupe se construit. Cela passe par la manière de se saluer, de se parler, de se nourrir, de s’habiller... L’argument “pour ne pas ressembler aux koffars (mécréants)” peut à première vue sembler religieux, mais il recouvre en vérité l’ensemble des êtres humains qui ne sont pas “exactement comme eux”, autres musulmans compris et ne s’appuie sur aucune tradition culturelle ou religieuse. Soit tu es exactement comme moi, soit tu deviens un danger pour le groupe.
Donc, selon vous, l’intégrisme n’a rien de religieux ?
- Dans l’intégrisme, il ne s’agit pas de se soumettre à une religion mais de s’approprier l’autorité de cette religion en son nom propre pour s’ériger soi-même en autorité au-dessus de tous les autres hommes. Les intégristes n’ont que faire de Dieu. Ce qu’ils veulent, c’est prendre la place de Dieu ! Je ne crois pas que la différence entre l’intégrisme et l’islam tient à l’interprétation des textes. Les intégristes n’ont que faire des discussions théologiques. Ce qui les intéresse, c’est de faire dire à l’islam ce qu’ils ont envie qu’il dise. Si un autre moyen leur procurait de la toute puissance et de l’extase, ils l’utiliseraient... Il faut donc arrêter de faire croire que le « bon islam » vaincra « le mauvais » et que tout sera réglé une fois que les imams seront meilleurs...
Vous êtes contre la formation des imams en France ?
- Non, je suis pour, mais cela ne réglera pas le problème de l’endoctrinement des jeunes, c’est tout...
En France, les jeunes ont-ils des liens avec les groupuscules politiques du Moyen-Orient ?
- Pas directement, non. La force de l’intégrisme néo-européen est spécifique et se distingue de ce qui se passe en Palestine ou en Irak. Impossible dorénavant de les classifier selon des critères traditionnels : plus de zones géographiques définies, pas de revendications nationales construites, pas de courants religieux homogènes, pas de méthodes d’action structurées, pas de combat politique élaboré...
Mais alors, comment ces discours les attirent-ils ici ?
- Le discours intégriste fonctionne comme une secte. Il s’agit de créer l’unité totale entre les adeptes. Il exacerbe les différences avec “les autres”, c’est-à-dire tous ceux qui n’adhèrent pas à la secte. Et il exagère les ressemblances entre « adeptes », jusqu’à provoquer l’amalgame. Pour qu’à l’intérieur du groupe, les uns ne se distinguent plus des autres. En fait, on donne l’illusion au jeune de percevoir exactement les mêmes émotions que “ses frères”, d’être absolument le “même”, afin qu’il perde ses contours identitaires. C’est pour cette raison qu’il coupe le jeune de tous ses autres liens, y compris sa famille. Pour anéantir toutes les différences d’un jeune à l’autre. Comme toutes les idéologies de ruptures, l’intégrisme repose sur l’exaltation de groupe.
Sur quels types de jeunes ce discours fait-il autorité ?
- Sur des jeunes qui se sentent « de nulle part ». C’est leur seul point commun. Les théories qui prétendaient que tout s’explique par la perte d’espoir social ne marchent plus : des ingénieurs, des médecins, deviennent terroristes... Mais un jeune vivant en France qui se sent Arabe, Marseillais, Français, Kabyle, Roubaisien, Tunisien, Algérien, Bambara, etc., ne tombe pas dans l’intégrisme. Le lien territorial, quel qu’il soit, les protège. Il fait lien avec les autres, il relie le jeune à la réalité, il relie le jeune à la terre.
Quel lien avec l’intégrisme ?
- Le discours intégriste est subtil. Au lieu de dire qu’ils doivent s’enraciner, l’intégrisme leur promet de devenir des héros de la révolution mondiale : « Vous n’êtes pas Anglais, ni Américains, Français, Marocains, Algériens, vous êtes au-dessus de tous ces gens-là ! Sachez que si vous vous sentez étrangers, c’est que Dieu vous a élu parce qu’Il sait que vous êtes supérieurs aux Arabes, aux Asiatiques, aux Européens, et surtout, surtout aux Américains... »
Le discours intégriste fait autorité parce qu’il fait sens sur des jeunes qui ne se sentent de nulle part. Il leur offre un espace de substitution virtuel supérieur au reste du monde qui leur garantit la toute-puissance. Ce n’est pas pour rien que 99% de l’endoctrinement se fait par un moyen de communication également virtuel : Internet ! Les internautes ne se rencontrent qu’une fois endoctrinés. L’intégrisme fascine ceux qui sont sans attache, les particules volantes qui ne savent ni d’où elles viennent et ni où elles veulent aller, en leur offrant un univers où ils reconstruisent de nouvelles démarcations.
Vous revenez sur les trous de mémoire aussi...
- Oui, quel que soit l’angle de mes travaux, je retombe toujours sur cette absence de récit collectif... Cela laisse la place à des groupuscules pour mélanger histoire et mémoire... L’intégrisme instaure un rapport au temps qui consiste à répéter la création du monde. C’est pour cette raison que la fusion des individus au sein des groupuscules extrémistes se construit autour de la notion de foi extérieure : en récitant de manière obsessionnelle les rituels, on recrée l’atmosphère sacrée des évènements miraculeux de la création du monde musulman. C’est comme si on sortait du temps réel pour entrer dans un temps virtuel, un temps sacré partagé avec Dieu.
Donc l’intégrisme restructure les relations du jeune avec lui-même, avec son entourage, avec l’espace et avec le temps...
- Oui,exactement comme le fascisme, l’intégrisme redéfinit les frontières entre la sphère privée et la sphère publique, jusqu’à ce qu’il ne reste plus rien de la première. L’adepte ne doit plus avoir de droits en dehors des intérêts du groupe, ni de temps personnel, ni d’espace privé. Le public envahit le privé, jusqu’à ce qu’il ne reste plus rien de l’individu...
Comment dès lors le combattre ?
- Tout d’abord, déconfessionnaliser l’intégrisme. Puisqu’il prend son pouvoir en manipulant une religion, il faut donc lui ôter sa justification et le traiter comme n’importe quelle idéologie fascisante ! Ensuite, mieux vaut prévenir que guérir, car un jeune endoctriné n’est pas facile à aider. Il faut une politique psychosociale, basée sur la refonte de liens : ré ancrer les jeunes dans un territoire, combler leurs trous de mémoire... leur permettre d’être sujets de cette société, pour qu’ils retrouvent de la dignité sur terre. Et enfin, se donner les moyens de faire la différence entre ce qui relève de l’islam (et donc de la liberté de culte garantie par la Constitution française) et ce qui relève du dysfonctionnement et du radicalisme. Pour le moment, les musulmans sont pris pour des intégristes et les intégristes sont pris pour des musulmans ! L’amalgame avantage toujours les intégristes, qu’il produise du laxisme ou de la diabolisation !
Propos recueillis par Fériel Berraies Guigny
Expert pour l’Union Européenne sur la prévention de l’intégrisme, Dounia Bouzar a démissionné en janvier 2005 du Conseil Français du Culte Musulman. Elle a été désignée par le Time Magazine « héroïne européenne » pour son travail novateur sur l’islam et vient d’être nommée Chevalier de l’Ordre des Palmes Académiques. Chargée de recherche à la Protection Judiciaire de la Jeunesse, elle a co-fondé le projet Dynamique Diversité.
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