Le 3e Forum de l’Initiative la Ceinture et la Route se tient actuellement à Beijing, capitale de la Chine. Il marque les 10 ans de cette initiative de partenariat lancée par la Chine.
« La coopération Chine-Afrique dans le cadre de l’ICR a stimulé la connectivité et l’intégration des infrastructures à travers le continent africain », a déclaré Albert Muchanga, commissaire de l’Union africaine (UA) chargé du développement économique, du commerce, du tourisme, de l’industrie et des minéraux. « Au cours de ces dix dernières années, lorsque nous examinons le paysage africain, nous trouvons des preuves très concrètes de l’ICR. (…) Vous avez des réseaux de transport, des réseaux de communication, des centres logistiques et des parcs industriels, entre autres », a-t-il noté en énumérant quelques exemples de coopération entre la Chine et l’Afrique dans le cadre de l’ICR, lors d’un récent entretien accordé à Xinhua.
Ceci ne concerne pas seulement les transports, la preuve par Cuba. Pour Eduardo Regalado, chercheur au Centre de recherche sur la politique internationale de Cuba, l’ICR est un modèle d’inclusion et de coopération internationale : « L’ICR est hautement nécessaire pour les pays du Sud global, qui ont besoin de modèles de coopération qui aboutissent au développement économique (…) Tous les pays qui ont rejoint l’ICR satisferont leurs besoins en matière de développement économique. Il s’agit d’une véritable coopération axée sur la prospérité ».

Des d’élus réunionnais ont asséché les crédits pour le transport à La Réunion

A La Réunion, à la suite de la décision d’élus du groupe majoritaire de la Région en 2010, notre pays a été pris au piège du financement d’un chantier pharaonique : la route en mer. 1,6 milliard d’euros étaient initialement prévus. Cette somme comportait notamment tout l’argent de la reconstruction le train, réaffecté au projet de route en mer avec l’accord de Paris. Avec cette somme considérable, seule une demi-route a été construite, et il faut d’ores et déjà plus de 800 millions d’euros pour livrer la seconde partie du projet. Paris mettra 400 millions dans le chantier, pas un centime de plus.
Dans le même temps, Paris a exclu La Réunion de l’accès aux financements prévus pour construire des réseaux express régionaux ferroviaires. Autrement dit, à court terme, Paris n’accompagnera pas les Réunionnais dans la reconstruction de leur train.
Or, cet équipement est indispensable pour sortir notre pays du sous-développement en matière de transport. Mais dans le cadre actuel, l’essentiel de l’argent public prévu pour le transport doit être dépensé dans un chantier de route en mer. Une autre partie passera dans des projets de bus, et il n’y a donc plus assez pour un chantier de train.
Par conséquent, pourquoi ne pas innover pour trouver l’argent de la reconstruction du train ? La Réunion peut être une terre d’investissement.
D’une part, notre île dégage un PIB annuel de plus de 20 milliards d’euros pour moins d’un million d’habitants. D’autre part, avec le système français en place à La Réunion, la population de notre île bénéficie d’un pouvoir d’achat sans équivalent à plusieurs milliers de kilomètres à la ronde. Une grande partie de la solvabilité est d’ailleurs indépendante de l’activité économique et de ses risques. Elle est garantie par des transferts publics venant d’un Etat classé parmi les 10 plus riches du monde. Par conséquent, notre pays peut donc être un terrain propice au retour sur investissement pour un partenaire qui veut accompagner La Réunion dans la reconstruction de son chemin de fer.

Paris promeut l’Axe indo-pacifique pour contrer la Chine…

Dans le même temps, l’arrimage de La Réunion à Paris l’amène à suivre la stratégie de son gouvernement au niveau international. Par exemple, Paris promeut l’Axe indo-pacifique afin de contrer la montée en puissance de la Chine qui est en passe de redevenir la première puissance économique mondiale. En tant que région de l’Union européenne, La Réunion est prise également à son corps défendant dans la guerre économique lancée par Washington à l’encontre de la Chine. Les nouvelles accusations de l’UE jetant la suspicion sur les moyens employés par la Chine pour produire des voitures électriques moins chères que les Européens donnent une idée de la situation.
Paris ne serait-il pas en train de ramer à contre-courant des intérêts des Réunionnais ?

Laisser passer une « opportunité historique » ?

Dans ces conditions, les pays voisins de notre continent vont s’équiper en lignes de chemin de fer internationales grâce notamment à l’expertise chinoise, tandis que les Réunionnais seraient condamnés à regarder le train du développement passer sous leur nez ?
Il est essentiel de dépasser les blocages qui empêchent d’envisager d’autres partenaires que Paris ou l’Union européenne pour la reconstruction du train. Lors du Forum de l’Initiative la Ceinture et la Route, le secrétaire général de l’ONU a souligné « l’opportunité historique » qui se présente. Les Réunionnais devront-ils la laisser passer à cause d’intérêts parisiens qui ne sont pas ceux de La Réunion ? Il incombe aux Réunionnais d’avoir la responsabilité de décider eux-mêmes sur des sujets aussi importants. Arrêtons de prendre toujours l’Europe comme modèle, cessons de regarder exclusivement vers la France et n’ayons pas peur de nous moderniser !

M.M.