La direction d’Air Austral s’oppose à la volonté des salariés et des élus de La Réunion de sauvegarder l’identité réunionnaise et les emplois

Air Austral : « La direction nous dit que le rapprochement avec Corsair est l’unique projet »

25 novembre 2021, par Manuel Marchal

Selon « Tour Mag », il semble bien que du côté de la direction d’Air Austral, l’objectif est la fusion au plus vite avec Corsair qui demanderait à l’État de boucher un déficit où la crise COVID a bon dos, compte tenu des plus de 200 millions de cash injectés dans la compagnie entre 2012 et 2021 quand Didier Robert était président de la Région, collectivité principale actionnaire de fait de la compagnie. Une telle précipitation interroge. La direction a-t-elle peur d’un audit préalable à toute décision ? Quoi qu’il en soit, il a donc suffi de quelques années pour remettre en cause les décennies d’efforts qui ont permis aux Réunionnais d’être maîtres de leur désenclavement grâce au contrôle d’une compagnie aérienne long-courrier.

Sous le titre « Air Austral-Corsair : les dessous d’un mariage à la sicilienne… » publié le 21 novembre, notre confrère « Tour Mag » apporte un éclairage sur l’avancement du projet de fusion entre Corsair et Air Austral sur la base du dernier CSE de la société.
« La dette dépasserait, selon les chiffres communiqués lors du dernier CSE, les 220 millions d’euros. Un montant global qui court sur les 5 ans à venir. Dans cette ligne comptable se trouvent les PGE (près de 100 millions), les moratoires de dettes publiques et celles gelées. La direction n’a pas caché qu’une restructuration financière est inévitable. Les employés demandent un apurement de la dette, mais ce n’est pas du goût d’Air Austral, ni de Bercy pour le moment », précise « Tour Mag ». Notre confrère ajoute que le 1er novembre dernier, « les pistes de réflexion du Comité interministériel de restructuration industrielle (CIRI) ont été présentées aux représentants des salariés » :

Conséquence : suppressions d’emplois à Air Austral

« Le dossier comporte 3 axes stratégiques qui vont bien au-delà de la simple coopération commerciale :
Le premier concerne la mise en place de code-share avec Corsair, mais chaque entité reste indépendante, avec un gain annuel de 30 millions par compagnie.(…)
Le deuxième axe serait la mise en commun de la flotte, pour une économie annuelle de l’ordre de 40 à 50 millions pour les deux transporteurs. Ce choix impliquerait un impact sur le personnel.
Et pour finir, le 3e volet serait la fusion totale entre Corsair et Air Austral.
« Il y aurait alors la mise en commun de toute l’activité. Le gain sera de 50 à 70 millions d’euros par an, avec les conséquences que vous savez sur l’emploi. La direction nous dit que le rapprochement avec Corsair est l’unique projet, » analyse Frédéric Bénard. »

De plus, le délai de la décision sera court :
« Pour notre interlocuteur, il est hors de question que fin décembre, nous n’ayons pas trouvé de solution viable. Nous ne savons pas s’il dit ça pour pas mettre le feu aux poudres », selon Marie-Noëlle Wolff, déléguée syndicale UNSA Air Austral, citée par « Tour Mag ».
« Corsair demanderait à l’Etat de passer l’éponge sur les dettes, à la faveur d’un chèque tournant autour des 200 millions d’euros. De quoi permettre à Air Austral de repartir sur de bonnes bases. Et pour retomber sur ses pattes, la nouvelle entité devra se délester de quelques salariés », indique « Tour Mag » qui cite un nombre de suppressions d’emploi compris entre 30 et une centaine.
Du côté de Corsair, cette fusion est vue d’un bon œil :
« « J’observe qu’il y a une volonté étatique de renforcer les compagnies aériennes françaises. Cette alliance irait dans le bon sens. De plus, elle permettrait de maintenir l’entité réunionnaise et antillaise », espère Nicolas Pradeilles, le président SNPL ALPA de Corsair » qui souligne que « Bruxelles a bloqué notre flotte à 9 appareils au moins jusqu’en 2023, dans le cadre des aides accordées par l’Etat. Selon nous, l’avantage essentiel de la joint-venture réside dans le fait de créer un groupe de taille cohérente avec ceux de la concurrence ».

La direction a-t-elle peur d’un audit préalable à toute décision ?

Il semble donc que du côté de la direction d’Air Austral, l’objectif est la fusion au plus vite avec Corsair qui demanderait à l’État de boucher le déficit de plus de 200 millions d’euros où la crise COVID a bon dos, compte tenu des plus de 200 millions de cash injectés dans la compagnie entre 2012 et 2021 quand Didier Robert était président de la Région, collectivité principale actionnaire de fait de la compagnie. Une telle précipitation interroge. La direction a-t-elle peur d’un audit préalable à toute décision ?

Rappelons que le 16 novembre dernier, en réponse à une question du député David Lorion, le ministre Olivier Dussopt avait déclaré :
« Cette [crise], vous le savez, a révélé les fragilités structurelles d’Air Austral et, au-delà, d’autres compagnies qui desservent les territoires d’outre-mer, fragilités auxquelles nous devons répondre ».

Difficile de croire en effet que le gouvernement ignore que plus de 200 millions de cash ont été injectés dans Air Austral via des fonds publics ou la vente d’actifs entre 2012 et 2021.
Or, avant 2012, Air Austral était une compagnie structurellement bénéficiaire. Son ancienne direction arrivait en effet à verser chaque année des dividendes à ses actionnaires. Si la même gestion avait été maintenue, les plus de 200 millions d’euros de cash injectés auraient dû permettre de faire face aux coups durs. Dans ces conditions, Air Austral aurait pu se sortir de la crise sans avoir recours à l’endettement qui s’élève aujourd’hui à plus de 200 millions d’euros, ce qui lui aurait permis de ne pas être soumise aux décisions d’acteurs extérieurs à La Réunion.

Quelques années ont suffi à remettre en cause des décennies d’efforts

Une nouvelle aide de l’État serait donc conditionnée à une fusion avec Corsair. Paris signerait-il un chèque de 200 millions d’euros sans savoir pourquoi une telle somme est demandée ? Et quel sera le poids de La Réunion dans une holding dominée par Corsair, compagnie dont le siège social se situe désormais à l’aéroport de Guadeloupe ? Quel avenir et quelles conditions sociales pour les 900 salariés d’Air Austral ?
Il a donc suffi de quelques années pour remettre en cause les décennies d’efforts qui ont permis aux Réunionnais d’être maîtres de leur désenclavement grâce au contrôle d’une compagnie aérienne long-courrier. Que s’est-il passé ?

M.M.

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Messages

  • Vous avez tout dit dans le dernier paragraphe. Un Grand Homme passionné de l’aérien a créé une Magnifique Compagnie. Pour un problème d’ego, on lui a coupé les robinets bancaires dans une période délicate, cet Homme est parti et l’âme de cette compagnie avec lui. Merci à vous, nous avons connu les plus belles années, il nous restera nos souvenirs et nos yeux pour pleurer dans peu de temps, à moins d’un Miracle


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