La recomposition du paysage aérien dans notre région -3-

Air Madagascar remplacée par Madagascar Airlines : quelle sera la prochaine compagnie à disparaître ?

19 octobre 2021, par Manuel Marchal

Après South African Airways, c’est une seconde compagnie historique de notre région qui disparaît. Air Madagascar va en effet fusionner avec sa filiale Tsaradia pour devenir Madagascar Airlines. Le premier vol est prévu le mois prochain. Si le coronavirus a amplifié les difficultés de la compagnie, il n’explique pas tout. Un audit a souligné « des cas de corruption, des manques de rigueur dans la gestion, du népotisme dans le recrutement du personnel dont l’effectif dépasse le ratio usuel, des coûts de locations d’avion au-dessus des tarifs internationaux, majoration démesurée des charges fixe ». Le mal qui a mis à terre Air Madagascar n’est pas isolé dans notre région, notamment à Air Austral où la présidence de Didier Robert a rendu la compagnie réunionnaise totalement dépendante aux aides publiques.

Veloma Air Mad : la compagnie nationale tire sa révérence après 60 ans d’existence pour être remplacée par Madagascar Airlines.

Compagnie en crise depuis de nombreuses années, Air Madagascar vient à son tour d’être emportée par les conséquences de la pandémie de coronavirus. Depuis deux ans, ses avions sont cloués au sol à part quelques vols de rapatriement. Un déficit estimé à près de 80 millions d’euros, avec en suspend une condamnation à payer plus de 40 millions à Air France à la suite d’un jugement d’un tribunal de commerce français, la situation de la compagnie malgache était intenable. Selon un audit du cabinet Bearin Point, on a décelé « des cas de corruption, des manques de rigueur dans la gestion, du népotisme dans le recrutement du personnel dont l’effectif dépasse le ratio usuel, des coûts de locations d’avion au-dessus des tarifs internationaux, majoration démesurée des charges fixe », rappelle « l’Express » du 14 octobre.

Air Madagascar était une référence

La fin d’Air Madagascar rappelle l’impact que peut avoir une gestion clientéliste d’une compagnie aérienne. Air Madagascar était pourtant une compagnie très réputée. Conçue comme un clone d’Air France, elle avait développé une qualité de service qui n’avait rien à envier aux compagnies occidentales. Air Madagascar était une des rares compagnies à être capable de payer cash ses avions, et son centre de maintenance était une référence dans l’océan Indien, grâce à des techniciens compétents et motivés.
Ceci s’est effondré en raison de l’irruption du politique dans la gestion. Or, une compagnie aérienne n’est pas une entreprise comme les autres. Sa stratégie ne peut être définie que par des professionnels du secteur, compte-tenu des spécificités et des sommes considérables en jeu, et pas par des apprentis-sorciers s’imaginant patron de compagnie aérienne. Le recrutement de personnels sur la base de proximité familiale ou politique plutôt que sur la compétence a eu un impact négatif sur la stratégie de la compagnie. La pression du politique a ainsi abouti à un partenariat avec Air Austral qui n’a pas arrangé les choses. La direction d’Air Austral nommée par Didier Robert a voulu faire d’Air Madagascar un relai de croissance en obtenant les commandes de la compagnie nationale malgache. En fait, Air Austral et ses filiales ont obtenu le monopole de la desserte de Madagascar depuis La Réunion et Mayotte, favorisant des prix prohibitifs, hors de portée de la plupart des habitants de notre région. Le changement de gouvernement à Madagascar a mis fin à cette situation, mais le redressement n’était plus possible.

Didier Robert a coupé les ailes d’Air Austral

Ce qui a tué Air Madagascar menace également Air Mauritius et Air Austral. La crise COVID-19 a mis en évidence les conséquences d’une gestion politicienne d’Air Mauritius. La compagnie a dû licencier de nombreux travailleurs et réduire ses ambitions pour espérer passer le cap.
A La Réunion, le passage de Didier Robert à la présidence d’Air Austral a fait de la compagnie une filiale d’une Société d’économie mixte détenue majoritairement par la Région Réunion. Entre l’arrivée à la tête de la compagnie d’un ancien cadre d’Air France recruté par Didier Robert et le début de la crise COVID-19, ce sont des dizaines de millions d’euros que la Région a injecté dans la compagnie pour maintenir son équilibre, sans oublier la vente d’importants actifs, car Air Austral est devenue structurellement déficitaire et ne doit sa survie qu’aux aides publiques.
Air Austral avait pourtant les moyens d’éviter une telle catastrophe. Ses anciens dirigeants avaient en effet un projet novateur en partenariat avec Airbus : le low-cost long-courrier. Mais la possibilité de voyager 30 % moins cher toute l’année sans subvention allait à l’encontre de la politique clientéliste développée par Didier Robert pour tenter de garder son poste de président de Région.
Il a en effet transformé le hall de la Région Réunion en agence de voyages chargée de distribuer des bons de réduction pour des billets d’avion financés par le contribuable, bons utilisables chez les compagnies desservant la France en vol direct ou via Maurice. Le budget de cette opération dépassait 40 millions d’euros avant la crise COVID. Ainsi, la baisse du prix payé par le voyageur servait à construire une popularité à Didier Robert, tandis que le projet low-cost long-courrier a été récupéré par Air Caraïbes et fait les beaux jours de sa filiale low-cost French Bee, pour qui la ligne Paris-Réunion est le coeur de son activité.
L’annonce d’une fusion possible d’une Air Austral affaiblie avec Corsair détenue par des capitaux antillais est le résultat de cette politique. Les mêmes causes qui ont amené Air Madagascar à devenir Madagascar Airlines pourraient faire perdre aux Réunionnais le contrôle de leur compagnie aérienne, noyée dans une holding dominée par le lobbying antillais dont la puissance n’est plus à démontrer.

M.M.

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Messages

  • Air austral a été crée par qui vous savez AVEC NOTRE ARGENT, elle était censée nous transporter pour moins cher, mais dès sa création elle a aligné ses prix sur Air France. Je vous donne un exemple, pour un voyage à Mada 1h30 de vol Air austral nous sert UN REPAS COMPLET OBLIGATOIRE facturé un max bien entendu. Et de l’aveu de notre camarade Paul sa création était censée aider les réunionnais !!!!!!!!!!!!!

  • Il aurait fallut respecter les décisions, soit investir dans les 2 gros porteurs 380, dans leur version à 800 places, Là oui, on aurait été mieux servit, avec pourquoi pas des escales à Madagascar, Mayotte, avant France Métropole, le fait que le Covis se soit présenté entre temps, chamboulé tout le trafic aérien n’a rien arrangé les choses, bien au contraire hélas. Comme le A380 n’est plus disponible en neuf, ce serait top je trouve, enfin, c’est mon avis que l’on se "rattrape" en investissant dans 2 appareils d’occasion, donc moins chers car n’oublions pas, les pièces détachées elles, sont toujours disponibles, en attendant la prochaine génération d’avions gros porteurs et fonctionnant à l’hydrogène, le président Macron a demandé à Airbus de le finaliser pour 2035, soit dans 14 ans, ce sera alors le moment de se séparer de ces bons gros jumbos jet A380 qui nous auront bien servi entre temps, qu’en pensez-vous ? Arthur qui espère aussi, le retour du train un TER péi avec cette fois, la ligne qui irait de St Joseph à Ste Rose, voilà un changement, un vrai, positif pour tous, avec d’emplois durables, dignes du 21°.Siécle.


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