Gestion de l’eau à la Réunion : à quand une tarification sociale et écologique

13 septembre 2022, par David Gauvin

La question de la facture d’eau est dans la bouche de tous les Réunionnais. Nous ne reviendrons pas sur l’aberration de voir sur une île comme la notre la gestion de l’eau dévolue à de trop nombreux acteurs, Office de l’eau, Etat, intercommunalités depuis peu et avec quasiment autant de mode de facturation que d’acteur. La loi Brottes de 2013 permet la mise en place d’une tarification sociale, comment se fait-il qu’avec 40% de la population sous le seuil de pauvreté, elle n’ait pas été mise en place partout à la Réunion.

À La Réunion, l’eau n’est plus une ressource abondante. Sa gestion va devenir de plus en plus complexe du fait du changement climatique et de l’augmentation de la population.
(photo d’archives Toniox)

Si les charges d’eau restent relativement peu élevées en France au regard d’autres biens essentiels comme l’électricité ou l’alimentation, la facture dépasse 3% des revenus pour plus d’un million de foyers, un seuil utilisé comme convention pour identifier les populations confrontées à des difficultés d’accès à l’eau. Premier constat : le sujet est traité de manière très variable selon les territoires. Tout d’abord, de fortes différences du prix de l’eau existent d’une collectivité à l’autre : de 3,66 euros/m3 en Provence-Alpes-Côte d’Azur à 4,80 euros/m3 en Bretagne, pour un prix moyen en France métropolitaine de 4,19 euros/m3, soit une facture de 503 euros/an (42 euros/mois). Au 1er janvier 2016, le tarif moyen des services publics d’eau potable et d’assainissement collectif correspondant à une consommation d’eau de 120m3 par an s’élève à 2,26 €/m3 toutes taxes comprises (TTC), sur la base des 24 communes de La Réunion et s’établit à 1,76 €/m3 TTC, si l’on considère les 45 zones de service (eau potable seulement ou eau potable et assainissement collectif ensemble).

Et la seule facture d’eau ne suffira d’ailleurs pas à faire face au "mur d’investissement" en matière de renouvellement de leurs réseaux, auquel vont se heurter en particulier les collectivités rurales chargées d’assurer la gestion d’importants linéaires au regard de leurs ressources financières. Les politiques sociales de l’eau sont donc elles-mêmes le reflet des disparités territoriales et de la variété des choix politiques des collectivités en matière d’accès à l’eau. (“Tarification sociale de l’eau : des pistes pour lever les freins à sa ...”) Une boîte à outils qui comprend outre la tarification sociale au sens strict, c’est-à-dire la modulation des tarifs de la part fixe et/ou variable, et le cas échéant par tranches de volume d’eau consommée, l’attribution d’aides forfaitaires au paiement de la facture d’eau (chèque eau, allocation, fonds de solidarité logement etc.), ou a minima des campagnes de communication, des kits d’économie d’eau.

Le choix d’une politique sociale de l’eau doit à la fois d’être adapté aux problématiques locales, simple pour les usagers et présenter un coût de gestion le plus faible possible pour les collectivités, estime la mission flash de l’Assemblée nationale sur le sujet, qui présentait, le 23 février, ses recommandations. (“Tarification sociale de l’eau : des pistes pour lever les ... - CIDEFE”) Pour les corapporteurs, la connaissance précise des usages, l’établissement de plans d’actions dans chaque collectivité et la formulation d’un référentiel national pour les mettre en œuvre représentent des prérequis à une généralisation de la politique sociale de l’eau. "Les arbitrages en la matière doivent ainsi nécessairement, selon eux, résulter "de la réalité du terrain, qui prenne en compte les caractéristiques socio-économiques de la population, le type d’habitat, le prix des services d’eau et d’assainissement ou encore l’état de la ressource"." (“Tarification sociale de l’eau : des pistes pour lever les freins à sa ...”)

Concernant la tarification progressive, la mission n’y voit que des avantages sur le plan à la fois écologique (en incitant tous les ménages à mieux consommer l’eau en fonction de leurs besoins) et social (grâce à une tarification plus avantageuse pour les personnes précaires). Cette tarification progressive pourrait donc être "privilégiée partout où elle est adaptée", en distinguant trois tranches de prix sur le modèle du syndicat de l’eau du Dunkerquois : une première de 0 à 80 m3 pour "l’eau essentielle", à un coût symbolique, avec un tarif préférentiel pour les foyers en situation de précarité ; une deuxième de 81 à 200 m3 pour "l’eau utile", à un tarif inférieur au coût des services ; une troisième au-delà de 200 m3 pour "l’eau de confort", à un tarif supérieur permettant d’équilibrer le budget du service. Pendant ce temps-là, la CIREST a décidé d’augmenter les tarifs de l’eau à St André et sur toutes les autres communes au fur et à mesure des renouvellement de contrat…pathétique. Le pouvoir d’achat des Réunionnais et des St Andréens en particulier est déjà mis à mal par l’inflation, on devra bientôt faire face à une hausse exponentielle de la facture d’eau alors que la loi permet la mise en place d’un bouclier social depuis 2013.

« La raison n’a qu’un but, c’est l’utilité, et deux moyens : Contempler et agir. » Francis Bacon

Nou artrouv’

David Gauvin

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  • il est clair que l’eau potable ,e peux plus ,depuis longtemps ,être considéré comme un produit inépuisable et gratuit . Mais c’est, surtout, un produit vital .
    il ne doit donc pas subir la loi des marchés. Aucune entreprise ou société publique ou privé ne doit faire des excédents sur l’eau. la formule évoquée dans l’article et bonne.
    une première tranche ( gratuite (ou quasiment gratuite), une deuxième tranche au prix coutant et une troisième, pour les gros consommateurs , plus chères.
    ceci éviterais le gaspillage.
    de plus , dans certaines viles de métropole , ll existe un système de distribution de l’eau non potable, très peu chère. Pas pour boire mais pour le WC ,les petits jardins et autres. C’est en ville donc différent de l’eau agricole.
    Pourquoi ce dispositif n’existe t’il pas à La Réunion ?


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