Manger gratuit i coute cher

29 juin 2012, par Geoffroy Géraud-Legros

Gouverner, c’est prévoir, dit-on. Pas si simple, dans un contexte de crise où les besoins immédiats sont de plus en plus criants et où tout, sous l’influence des médias, pousse au sentiment de l’urgence et de l’instantané. Plus ardu encore au niveau des collectivités locales, dont les ressources se réduisent au fur et à mesure qu’augmentent leurs obligations. Et où endettement, impuissance, crucifixion par des juridictions comptables — non dénuées d’arrière-pensées politiques — guettent les élus, soumis aux courants traîtres d’une décentralisation dévoyée. 
C’est dire l’atout que constitue une collectivité qui parvient à maintenir l’équilibre, voire à anticiper des « creux » dans l’activité économique, pour garantir un engagement fort à travers une politique de grands travaux — une option, diraient les économistes — keynésienne. C’est dire, aussi, l’intérêt minutieux et la mobilisation permanente qui doivent être de mise vis-à-vis des ressources essentielles que sont les fonds européens, particulièrement décisifs dans le cadre d’une Région ultrapériphérique (RUP) de l’Union européenne telle que La Réunion.

A cet égard, le parcours de la Région Réunion depuis 2010 donne à réfléchir. Dotée d’un budget d’investissement supérieur au budget de fonctionnement à l’issue des deux mandatures entamées en 1998, l’institution disposait de ressources disponibles pour la relance. Son basculement à droite, suite à la triangulaire de mars 2010, a engagé un cours nouveau. Les fonds sauvegardés jusque-là ont été employés à des mesures immédiates et limitées dans le temps : aide au désengagement de l’État, en finançant à sa place la continuité territoriale, programme “POP”, compensation de la hausse des carburants au bénéfice des pétroliers, etc.

Des dispositions teintées d’électoralisme… et qui, en termes d’affichage, donnent l’impression d’une gouvernance spontanée et généreuse, contre une gestion dont le caractère économe et rigoureux renvoyait une image certainement moins « tendance ». Epaulée par une communication omniprésente, cette distribution de cadeaux ponctuels masque, dans les faits, l’arrêt de la politique d’investissement et de développement mise en œuvre depuis plus d’une décennie. Et dissimulent, aussi, que le « manger gratuit i coute cher ». Car ce qui n’est pas directement visible, sous le bombardement d’un budget de com’ régional qui a explosé en trois ans, c’est que ce qui est fourré dans la poche droite des citoyens sort de leur poche gauche. En d’autres termes, ce sont les contribuables qui paient les bienfaits qu’on leur vante à longueur de pages achetées à prix d’or dans la presse.

Dès lors, l’annonce d’un retard dans l’usage des fonds européens est plus qu’alarmante ; de meilleure élève en la matière entre 1998-2010, La Réunion pourrait rejoindre la queue de peloton. Conséquence possible : à défaut d’investissements, notre île pourrait se voir attribuer à l’avenir des ressources moindres, et accumuler encore des déficits de développement, et donc d’emplois. Les grands projets seront-ils au rendez-vous ? La responsabilité de la Région Réunion, instance de coordination de l’action économique, est engagée.

GGL


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