Parcoursup : algorithme qui contraint l’avenir de la jeunesse

30 mars 2022, par David Gauvin

Les lycéens avaient jusqu’à hier pour formuler leur voeux d’admission post bac sur parcoursup. Cette plateforme est la quintessence du monde libéral ou les algorithmes décident l’avenir de la jeunesse.

Les lycéens avaient jusqu’à minuit ce mardi 29 mars pour formuler leurs vœux d’études sur Parcoursup, plateforme d’admission post-bac en place depuis 2018. Entre le 30 mars et le 7 avril, il faudra ensuite finaliser le dossier candidat avec les éléments demandés par les formations et confirmer les vœux soumis. Il faudra alors attendre le 2 juin pour que les premiers résultats aux demandes d’inscriptions commencent à arriver. Le site a toujours été contesté, à tel point que plusieurs candidats à la présidentielle de 2022 voudraient le supprimer. La plateforme d’admission dans l’enseignement supérieur “progresse dans son efficacité”, avait souligné mi-février un rapport, qui évoquait cependant plusieurs pistes d’amélioration. Le rapport de 83 pages a été écrit pour la quatrième année consécutive par le Comité éthique et scientifique de Parcoursup (CESP), présidé par Isabelle Falque-Pierrotin, conseillère d’État et ancienne présidente de la CNIL, et composé de six membres issus d’horizon divers.

Parcoursup, successeur d’APB depuis 2018, “est devenu un objet totémique qui alimente des controverses souvent excessives (…) mais il est indéniable que sa mise en place constitue un progrès”, écrivent-ils. Les auteurs considèrent que “l’efficacité de la procédure progresse dans l’affectation des candidats et n’a pas pâti de l’élargissement du périmètre de la plateforme (effectif et profils des candidats, nombre de formations) avec en 2021, 94 % de néo-bacheliers ayant reçu une proposition”, a déclaré lors d’une visioconférence de presse Isabelle Falque-Pierrotin. Ce rapport identifie toutefois un frein aux admissions, notamment lié aux propositions de la part des établissements pour les formations sélectives, dont certaines ne sont pas “remplies” en toute fin de procédure. Il préconise ainsi de “réaliser un ‘surbooking’” dans les formations sélectives qui n’ont pas rempli leurs effectifs les années précédentes. Mais de qui se moque-t-on ?

Si beaucoup reconnaissent des progrès par rapport à APB – notamment la fin du tirage au sort, la création de quotas de boursiers ou les informations sur les formations fournies par la plateforme –, syndicats et spécialistes du sujet soulignent cependant des lacunes de Parcoursup. Pour Hervé Christofol, membre du bureau national du syndicat Snesup-FSU, « on ne va bien sûr pas revenir à des inscriptions sur papier et des files d’attente devant chaque université », mais « il faut abandonner le non-classement des vœux, qui a créé une réelle mise sous tension des formations, et a pour conséquence de faire du surbooking ». Selon lui, il faudrait « créer de nouvelles places pour supprimer la sélection ». Le fait que les propositions soient faites « au fil de l’eau » est également critiqué, les candidats se retrouvant souvent sur liste d’attente. Ils pourront recevoir cette année des réponses du 2 juin jusqu’en septembre. « C’est une procédure qui s’étale sur plusieurs mois et qui crée un certain nombre de difficultés », notamment « pour les étudiants qui n’ont pas la possibilité d’attendre jusqu’à l’été pour se décider », souligne Julien Grenet, directeur de recherche au CNRS et coauteur d’une étude de l’Insee sur Parcoursup.

« Ce qui a été souligné parfois, c’est une certaine forme de violence symbolique, qui vient du fait que les candidats qui ont les meilleurs dossiers reçoivent beaucoup de propositions dès le premier jour et sont fixés sur leur sort, alors que ceux qui ont des dossiers plus faibles vont devoir attendre », ajoute Julien Grenet. Les formations qui ont plus de candidats que de places proposées classent en fonction du dossier. Les élèves « se demandent comment ils ont été évalués, il y a un gros sentiment d’injustice », indique Alban Mizzi, doctorant en sociologie et spécialiste de Parcoursup. « La procédure est longue, stressante, opaque. » Parcoursup a entériné ce principe du mérite scolaire en construisant une égalité formelle devant la sélection. Une seule plateforme traite toutes les candidatures, la procédure est uniformisée, tout le monde est, apparemment, traité de la même façon. Avant Parcoursup, il y avait toutes sortes d’exceptions, les prépas pouvaient par exemple choisir dans le haut du panier. Évidemment, la plateforme crée une égalité de façade qui contribue par ailleurs, peut-être, à faire oublier des inégalités plus fondamentales, comme l’inégalité des chances scolaires. L’origine sociale est encore déterminante dans la réussite scolaire. Or, c’est elle qui va compter dans l’attribution des places. Mais Parcoursup crée la fiction d’une égalité de départ. Une fois que tout le monde est à égalité, que le meilleur gagne, et on fabrique de la sélection.

« La reproduction des inégalités sociales par l’école vient de la mise en œuvre d’un égalitarisme formel, à savoir que l’école traite comme « égaux en droits » des individus « inégaux en fait » c’est-à-dire inégalement préparés par leur culture familiale à assimiler un message pédagogique. » Pierre Bourdieu

Nou artrouv’

David Gauvin

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