Société

Il n’y a aucune preuve que l’immigration entraîne une augmentation de la criminalité et du chômage

Un rapport de l’Union européenne l’a souligné

25 mars 2003

Les principaux éléments susceptibles d’influer à l’avenir sur les politiques de l’immigration de l’Union européenne (UE) constituent le thème central d’un rapport financé par l’UE qui a été publié le 14 mars. Ce rapport passe en revue les conclusions de 17 projets de recherche différents et fait l’état de la situation concernant les mouvements de population et l’immigration en Europe. Il y est démontré qu’il n’y a aucun rapport de cause à effet entre immigration, criminalité et chômage. En outre, l’existence d’une importante économie souterraine peut encourager l’immigration. L’étude montre également que les immigrés ont tendance à accepter des emplois marginaux dont les ressortissants de l’UE ne veulent pas et que, si l’immigration diminuait, l’Europe pourrait souffrir d’une pénurie de main-d’œuvre.

« L’ignorance est la base du racisme », a déclaré Philippe Busquin, membre de la Commission européenne chargé de la recherche. « Ce nouveau rapport permettra de faire en sorte que les futures politiques ayant trait aux questions d’immigration tiennent compte des dernières informations disponibles sur les problèmes que les immigrés rencontrent aujourd’hui en Europe ».
Les études analysent la situation tant dans les pays d’immigration récente que dans ceux ayant une plus longue tradition d’immigration comme la France, l’Allemagne et le Royaume-Uni. Le rapport souligne l’importance des recherches comparatives et de l’échange d’expériences au niveau international et, d’après ses auteurs, une telle collaboration transnationale pourrait servir de base solide à une action de l’UE visant à atténuer les problèmes auxquels les immigrés sont confrontés aujourd’hui. Les 17 projets de recherche ont été menés dans le cadre du programme de recherche socio-économique finalisée.

Nouvelles tendances

Le rapport établit que les immigrés ne sont pas la cause de l’économie souterraine, mais plutôt que celle-ci encourage l’immigration, tant au Sud qu’au Nord de l’Europe. En Allemagne, les tentatives de mettre un frein à l’immigration clandestine n’ont eu aucun effet sur l’économie informelle. L’existence d’une économie souterraine pourrait agir comme un aimant sur les immigrés les plus pauvres et, après qu’ils se soient intégrés dans cet environnement, les inciter à rester en Europe. Et cela conduit les Européens à ranger les immigrés dans la catégorie des criminels. Les recherches montrent aussi que la discrimination que subissent certains immigrés peu après leur arrivée constitue vraisemblablement un facteur d’inégalité et de fracture sociales et, en dernier ressort, favorise la criminalité.
Même si, d’un pays européen à l’autre, il subsiste de grandes divergences d’interprétation des conventions internationales sur le regroupement familial, l’immigration qui résulte de ce dernier est de plus en plus motivée par la recherche d’un emploi. L’augmentation de l’immigration des femmes n’est pas uniquement due au regroupement familial mais aussi à la demande de main-d’œuvre féminine dans certains secteurs d’activité comme le tourisme et les travaux ménagers.
Les recherches font apparaître que, si le droit au regroupement familial des travailleurs immigrés est bel et bien garanti par diverses conventions internationales, dans la pratique, la plupart des États membres interprètent la loi à leur façon et soumettent le regroupement familial à des conditions très strictes. La politique de l’UE reconnaît le regroupement familial, mais la résolution de Copenhague de 1992 à ce sujet n’est pas juridiquement contraignante.

Qualité de vie

Les recherches ont surtout permis d’établir que les immigrés jouissent généralement de plus mauvaises conditions de vie que les ressortissants de l’UE vivant dans les mêmes zones géographiques, notamment en matière d’emploi et de logement. Les enfants d’immigrés ont tendance à avoir d’assez mauvais résultats à l’école mais aussi davantage de problèmes et un taux d’abandon plus élevé. D’après les recherches, il est généralement admis que de mauvaises conditions de vie et de travail sont la norme pour les immigrés. Et, pour nombre d’entre eux en Europe, le chômage constitue l’un des problèmes les plus sérieux. Concernant le taux d’emploi en Allemagne, par exemple, l’écart entre étrangers et Allemands s’est nettement creusé entre 1979 (0,7%) et 1998 (8,5%). De plus, tandis que seulement 38% des Allemands sans emploi n’avaient pas de qualification professionnelle en 1997, la proportion atteignait 78% pour les étrangers. Le taux de chômage parmi les étrangers de 16-21 ans en zones urbaines est estimé à 50% au moins. En France, la situation est analogue pour ce groupe d’âge (15-24 ans).
Les auteurs du rapport concluent que le chômage n’est pas directement lié au taux d’immigration. Au contraire, les immigrés ont tendance à occuper des emplois marginaux refusés par la plupart des natifs. Si l’immigration diminuait brusquement, le chômage augmenterait de fait, et non l’inverse.

Vers l’avenir

Les résultats des recherches mettent en évidence l’influence déterminante que les autorités nationales ont sur les conditions d’immigration et d’intégration. Ils montrent également que, dans ce domaine, les politiques ont souvent eu des conséquences imprévues, voire néfastes. Un exemple patent en est le renforcement des contrôles aux frontières qui a, en fait, favorisé les filières d’immigration clandestine.
Les services publics jouent un rôle capital en matière d’intégration. Pour éviter la marginalisation sociale des immigrés, il est indispensable qu’ils puissent avoir accès à l’éducation, aux prestations sociales, à la santé et aux autres services comme n’importe qui. Cependant, les recherches ont révélé que certains types de services ont, en fait, pour effet d’accentuer l’exclusion en isolant les immigrés du reste de la population. Certains services spécialement destinés aux minorités peuvent freiner l’intégration dans le système éducatif et le marché du travail.
Dans bien des cas, l’opinion publique semble influer sur les politiques officielles. Et les comportements ont souvent entravé la mise œuvre de politiques conçues pour assurer une plus grande équité ou lever les obstacles à l’intégration. Les médias et les dirigeants politiques ont une grande part de responsabilité dans cet état de fait.
Enfin, les résultats des recherches font apparaître la diversité des expériences entre groupes d’immigrés, pays d’immigration et sous-groupes dans chaque pays. Les politiques doivent refléter cette diversité. Par ailleurs, il existe aussi de nombreuses similitudes en ce qui concerne les expériences d’installation, la constitution de communautés ainsi que les lois et politiques nationales. Cette convergence peut servir de point de départ à l’élaboration de politiques conjointes. Elle souligne l’intérêt des recherches comparatives et de l’échange d’expériences au niveau international. L’approche transnationale collective suivie dans les études multinationales peut constituer la base d’une coopération à l’échelle de l’UE dans ce domaine.


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